Vous avez été invitée lors du Printemps des Entrepreneurs organisé
par le Medef. Ce genre de sollicitation, vous le prenez comme une vraie
reconnaissance chaque fois ?
"Oui c’est une belle reconnaissance et un intérêt personnel."
Depuis
l’an passé et votre titre de personnalité de l’année 2012 décerné par
le célèbre guide Bettane et Desseauve des vins de France, on vous a vu
donner beaucoup d’interviews. Ca fait aussi partie de la reconnaissance.
"Oui
complètement. La reconnaissance de mes pairs, ce qui est très
important. Mais je ne la prends pas spécialement pour moi, mais plus
comme une reconnaissance du travail de plusieurs générations. Je
représente la 3e génération, la première femme mais je m’inscris
vraiment dans une continuité."
Qu’est-ce qui intrigue le plus dans
votre parcours ? Le fait d’être une femme, que vous ayez repris le
domaine de votre père ou que vous ayez totalement changé de vie, passer
de prof d’italien à l’ENA à une vigneronne de Condrieu ?
"Les trois je
crois. Ils peuvent paraître surprenants. Mais pour moi c’est un
parcours qui est presque une continuité. Je crois que pour reprendre un
domaine, il faut s’être construit ailleurs.
Une femme dans le milieu du vin, ca étonne mais de moins en moins."
Quel a été le déclic ?
"C’est
le départ de mes parents à la retraite, je ne l’avais jamais imaginé.
Je suis resté une petite fille qui ne voit pas ses parents vieillir.
J’ai eu conscience que le domaine allait s’évanouir."
Quinze après, vous n’avez pas de regret ?
"Aucun ! Vraiment aucun."
Suite à ce classement dans les meilleurs domaines de France, vous avez remarqué un avant et après ?
"Non.
Il y a eu un peu plus d’intérêt médiatique mais le regard de mes pairs
est toujours le même. Ca mettre presque plus de pression. Rien n’est
acquis, c’est une certitude."
En produisant du Condrieu, du
Saint-Joseph et du Côte-Rôtie, vous avez la possibilité assez rare de
travailler avec du blanc et du rouge. Qu’est ce que vous préférez ?
"Ah
la question difficile pour moi… Souvent les vignerons ont une
préférence ou sont plus connus sur le blanc ou le rouge. Mon père était
connu pour le Condrieu, il a sauvé l’appellation. Donc moi en arrivant,
je me suis peut-être plus investi sur les rouges. Avec la reconnaissance
pour les deux couleurs. J’ai un rapport très différent, je n’ai pas les
mêmes sensations mais j’ai le même plaisir."
La sensibilité d’une femme, c’est un plus ?
"Ca
m’est difficile de répondre. Les hommes ne me disent rien. Mais je
crois qu’une femme dans un milieu d’hommes n’a pas de concurrence. Bien
sûr qu’elle est confrontée au regard des autres mais on arrive presque
avec plus de libertés. Je n’ai pas envie de prouver quelque chose par
rapport aux hommes. Je ne me confronte pas vraiment, j’ai envie d’agir.
Le
monde du vin est un monde particulier. Il a une symbolique forte, c’est
le sang de la vigne, les femmes étaient interdites dans les caves et
puis ca reste physique, difficile. Mais les femmes aujourd’hui arrivent
en sommellerie et s’autorisent à reprendre des domaines. Les filles de
vignerons y pensent."
C’est le cas de votre fille ?
"Peut-être… Peut-être une quatrième génération mais j’ai encore le temps."
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