Triomphe (II)

Triomphe (II)
Romain Meltz - DR

Intérieur Nuit, Une antichambre de Palais.

David Kimelfeld
Eh ! Monsieur le maire, pourquoi restez-vous là ?
Je bats en vain ce palais, ne vous trouve pas.
Pourquoi ces coulisses : royaume pour en bas ?
La pièce s’est jouée, avec vous en  principal.
Le temps de prendre ce que le Destin vous doit
est venu. Levez-vous, posture impériale,
à nul autre que vous Il ne veut rendre ce Graal.
Hier, certes, l’apparente multiplicité
faisait croire que d’autres pussent se couronner
Mais les autres visages - illusions dissipées -
restent face à vous en Conseil, non point devant.
Le peuple vous attend, ou ceux qu’il a élu.
Oint par le sacre chacun peut devant vous
tandis qu’assis vous les pouvez laisser debout
Prendre une parole peut être par vous accordée
Ou doivent se taire si telle est votre volonté.
Toute parole est d’or, la vôtre est de diamant
Car, Seigneur, vos mots sortent  forgés autrement  
que le souffle qui meurt sur les autres lèvres.
Ce que vous dites, monsieur, se fait aussitôt
Parlez :  la nature s’inclinera bientôt

Gérard Collomb
Laissez, David, il me faut  un peu plus de temps
Mon souffle est court, je bouge lentement.
Un plein calme en ces lieux assure cette tête
Qui s’abrite plutôt d’un noir qu’elle regrette.
Voici l’heure, je sais, de reprendre la marche
mettre encore mes pas dans mes pas. Encore
Sur un chemin qui, nulle part que je sache
Ne conduira pour moi à plus de gloire, plus d’or.
Est-ce marcher pourtant quand on ne peut s’asseoir ?
Pressé par un démon insatiable de servir
un peuple qu’on sert et qui ne veut pas y croire
qu’on veut libérer, qui pense qu’on veut l’asservir

David Kimelfeld
Ah ! Ces mots sonnent peu comme des mots de victoires
On s’attend à  triomphe plus joyeux, Gérard

Gérard Collomb
De la joie dis-tu ? Pourquoi devrais-je en avoir ?
A vaincre sans peine on triomphe sans gloire
Sur le chemin de la campagne, le reflet
de moi-même, brillait bien moins que je le voulais

David Kimelfeld
Mais comment ? Vous mettez vous à dire ici,
le contraire de ce que vous avez déjà dit ?
Avez-vous donc tout fait ? Tout  dit ? Tout défini ?
N’êtes-vous plus celui qui bâtit, qui rassure ?

Gérard Collomb
Y croyais-je alors ? Je n’y crois plus du tout
Ma volonté, mes envies, tout m’échappe
Des volontés autres obscurcissent à mes yeux
le chemin que je croyais mener à Dieu
formant un obstacle que je ne peux contourner.
Maitre d’un territoire confetti, reste d’empire
hier bien trop vaste pour qui le voulait parcourir
que ne vois-tu pas, David, que je dois mendier
ce droit simple de plier à ma volonté
ce que j’ai moi-même créé ? Mon propre enfant ?
Ma voix étouffée par la fureur ne peut pas
tant le courroux me domine de tout son poids
blâmer d’une légale colère tous ceux qui osent
vouloir à ma place régner là où je règne

David Kimelfeld
Simple contretemps que vous aurez bientôt réglé

Gérard Collomb
Tu écartes bien facilement, mon jeune dauphin
Les vents contraires qui étouffent ma voix
S’il n’y avait que ceci, il n’y aurait pas cela :
N’entends-tu pas les cris du sol que nous foulons
qui rient de nous porter, qui portent un autre nom ?
Nous sommes chez elle !  Ce sol est son sol, volé.
Ce que je lui avais donné, elle l’a gardé.

David Kimelfeld
Allons bon, ce n’est qu’un petit morceau de terre

Gérard Collomb
Mais c’est le premier, cette perte est trop amère.
Nous devons trop céder à trop d’adversaires
Tout ce que cette ville a de noble est à eux

David Kimelfeld
Il n’y a pas de honte à parler pour le peuple

Gérard Collomb
Pour que ma voix porte elle doit porter toutes les voix
Je ne m’entends plus si d’autres parlent comme moi.
Je dois pourtant me ressaisir, faire bonne figure
Et continuer à me servir d’Excalibur
Ouvre donc  la porte David, qu’ils entrent aussi
Il est temps de redevenir ce que je suis

Romain Meltz
@lemediapol

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Meltz

2 commentaires
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Tabarly le 09/04/2014 à 19:22

Vous nous faîtes l'acte 2 après le Grand Lyon ?

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romainblachier le 09/04/2014 à 14:31

belle écriture. Bravo!

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