La Cuisine politique et le reste

La Cuisine politique et le reste
Romain Meltz - DR

Disons que l’action politique ce sont des investissements (construire une nouvelle école), du fonctionnement (payer le personnel du périscolaire) et des interventions (subventionner l’heure de garde). En un mot : du service aux citoyens.

Mais c’est aussi beaucoup beaucoup de ce que j’appelle des ‘histoires en Cuisine’ : trouver de la place pour construire une école, acheter le terrain, choisir un architecte, faire les travaux, recruter le personnel périscolaire ou subventionner une association qui s’en occupe, trouver des activités, etc.

Dans l’idéal, ces histoires en cuisine devraient être très secondaires par rapport au service rendu aux citoyens.

Mais dans les faits…

Je me rappelle la réaction de Thierry Philip (vice-président Santé) à l’annonce de la démission de son collègue Olivier Brachet (vice-président urbanisme et habitat) à peine un mois après la naissance de la Métropole. Cette démission n’était-elle pas le signe de l’échec de la Métropole du point de vue du service rendu au citoyen ? Thierry Philip a protesté : "Depuis un an [mars 2014-février 2015] on a réconcilié les budgets du Conseil Général et du Grand Lyon, on a fait en sorte que les salariés de l’ex Conseil général soient payés à la fin du mois de janvier sans problème, on a réglé un nombre de problèmes absolument incroyable…". Qu’un médecin comme Thierry Philip - qui sait ce que c’est que de rendre un service au public - considère qu’il est normal qu’une structure comme la Métropole mette un an avant de pouvoir régler ses problèmes en Cuisine, voilà qui est inquiétant.

Exemple de la réforme des rythmes scolaires. De l’aveu même d’Anne Brugnera et de Gérard Collomb, la première année a consisté à embaucher des animateurs pour essayer d’en avoir le bon nombre en face des enfants à garder le vendredi après-midi. Optique ‘histoire de cuisine’ assez prononcée donc. Mais pour 2015-2016, ils ont tous les deux promis : cette année scolaire là sera l’occasion de faire des animations périscolaires de qualité. Résultat, pour un décret pris en février 2012 par le ministre de l’Education Nationale, on envisage une augmentation de la qualité du service rendu aux citoyens pour septembre 2015 (sachant que juin 2017 est la fin programmée de l’expérimentation lyonnaise du truc).

Evidemment, plus la loi modifie souvent les règles du jeu plus elle augmente le risque d’une part accrue prise par les histoires en Cuisine.

Exemple amusant tellement il est caricatural. La clause de compétence générale (qui dit qu’un Conseil Régional – par exemple - peut agir sur tout ce qui est lié aux intérêts de la Région qu’il gère) était la règle depuis 1984.  Elle a été supprimée par la loi de décembre 2010. Puis elle a été rétablie en 2014. Car à cette date la loi de 2010 qui supprimait la clause de compétence générale a été annulée. Elle ne perdait rien pour attendre, car la loi NOTR(e) d’août 2015 l’a de nouveau (en attendant un probable retour prochain) supprimée.

En tant que citoyen, quand on réforme les services au public, mieux vaut donc ne pas être pressé de déguster le plat qu’on prépare grâce aux histoires en Cuisine.

Mais le pire c’est que les services publics peuvent se mettre en mode ‘histoire en Cuisine’ non pas suite à un changement de l’organisation de la cuisine politique, mais à cause d’un changement PREVU de l’organisation de la cuisine.

Encore cette fabuleuse loi NOTR(e). Elle vise aussi à rendre plus efficace les communautés de commune (qu’on appelle familièrement les com-com). D’ici au 1er janvier 2017, une com-com devra rassembler au moins 15 000 habitants ; au lieu de 5 000 actuellement. Prenons en exemple la communauté de commune du canton de Saint Trivier de Courtes, dans l’Ain. Petite précision : elle porte le nom du canton de Saint Trivier  mais appartient en fait au canton de Replonges suite au redécoupage des cantons d’il y a deux ans, elle a dû se dire que ce n’était pas la peine de changer de nom. Bien vu : cette com-com va de toute façon perdre son appellation en intégrant  la BBA (Bourg en Bresse Agglomération) pour le 1er janvier 2017.

Question en Cuisine : que va-t-il advenir des 6 Vice-Président actuels ? Et de tous les autres Vice-Présidents des 5 autres communautés de communes qui vont rejoindre la Bourg en Bresse Agglomération ? Car la BBA a déjà ses 13 Vice-Présidents qui n’ont sans doute pas envie de perdre leur poste. D’ici au 1er janvier 2017, on imagine bien qu’au moins une moitié des Vice-Présidents des 6 communautés de commune vont négocier, hésiter, menacer, reculer, pour se répartir les 17 postes de Vice-Présidents qui survivront au regroupement. Ça veut dire jusqu’au 1er janvier 2017 les histoires de Cuisine occuperont l’espace et que le citoyen attendra patiemment de voir un serveur sortir en salle (si vous me permettez de filer la métaphore).

Evidemment, j’entends les grands optimistes  de la vie politique soutenir qu’au 1er janvier 2017, les 17 Vice-Présidents de BBA seront fin prêts et que pourra s’ouvrir une nouvelle ère pour les habitants de Saint Trivier de Courtes face à une  nouvelle com-com  hyper efficace.

Sauf que dans un an une nouvelle histoire en Cuisine, une nouvelle réforme des règles du jeu  apparaîtra et qu’il faudra tout recommencer.

Bon appétit !

Romain Meltz
@lemediapol

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8 commentaires
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Jeansais le 05/11/2015 à 09:36

Pour être précis il y a en France (en métropole) 36 529 communes ( autant que dans le reste de l'Europe et 2133 EPCI (établissement public de coopération intercommunale) à financement propre; autrement dit les intercommunalités
Les SIVU, SIVOM ou autres syndicats intercommunaux sont alimentés par les subventions de communes.
Quant au pôle métropolitain de Lyon il regroupe la Métropole de Lyon (ex Grand Lyon), Saint Etienne métropole, le pays Viennois et l'intercommunalité de Bourgoin Jailleu...pour parler transport, tourisme, culture, emplois,...comme si la région ne pouvait pas se charger de ces compétences ?
Personne n' y comprend rien, les français s'en désintéressent et surtout ne veulent pas que l'on touche à leurs communes ( sur les 36529 communes 73% ont moins de 1000 habitants ..)
mais il faut bien payer les "cuisiniers" quand les élus viennent prendre l'apéro "à l'hôtel" ( de ville , département ou région )...

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@lemediapol le 04/11/2015 à 21:45
Jeansais a écrit le 02/11/2015 à 18h15

36 800 communes, 2 700 intercommunalités sans compter les SIVU ( syndicat intercommunal à vocation unique), les SIVOM (syndicat intercommunal à vocation multiple), les SCOTT, les pôles métropolitains ( attention c'est différent des métropoles)...auxquels il faut bien sûr rajouter les départements ( ou Métropole chez nous), les Régions ( c'est vrai que leur nombre a diminué) ...
Bref ! çà en fait des cuisiniers pour faire mijoter la tambouille...
Mais la France pays du bien mangé et bien boire cultive ses crus, ses clos, ses fromages ...et ses élus locaux !

Ah oui il y a cette histoire à mourir de rire ou Saint Etienne refuse de travailler avec Adel 42 (agence de développement de la Loire) car elle veut travailler avec l'Aderly (la même agence mais pour la Métropole) car pour Saint Etienne ce qui compte c'est le pôle métropolitain (qui rassemble - de mémoire - outre Sainté et Lyon, Vienne et une autre ville dans le coin)
enfin, bon, mieux vaut en rire

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@lemediapol le 04/11/2015 à 21:37
verseau30 a écrit le 03/11/2015 à 10h11

Analyse judicieuse sur un sujet bien connu.
J'ajoute qu'il doit y avoir environ 850.000 élus en France, toutes collectivités confondues, que chacun s'accroche à son pré carré, et que les français ne veulent pas que cela bouge ( des "veaux " disait le Général ). Exemple récent de la petite réforme des régions.
Une comparaison avec les pays nordiques ou l'Allemagne eût été un complément intéressant.
Dans ces pays, la cuisine est bonne avec beaucoup moins de cuisiniers.
En France, il faudrait bien entendu supprimer les communes pour ne laisser apparaître que les communautés ( on gardera la mairie pour les apéritifs ) ainsi que les départements ( on gardera les hôtels pour les apéritifs encore et il restera les hôtels des régions - que d'hôtels! - ce qui devrait suffire à loger les élus restants ). J'oublie les parlementaires dont il faudrait réduire significativement le nombre.
Ca va en faire des économies dans la suite de la COP21 !
Et toutes ces économies seront reportées sur le secteur privé ce qui permettra peut être de booster notre PIB avec de la valeur ajoutée plus pertinente économiquement parlant.

merci
ça serait une bonne idée de faire une comparaison avec l'Allemagne, la décentralisation là bas ça a l'air de tres bien marcher.
Il parait que la France compte la moitié des communes d'Europe
ça laisse de la marge

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verseau30 le 03/11/2015 à 10:11

Analyse judicieuse sur un sujet bien connu.
J'ajoute qu'il doit y avoir environ 850.000 élus en France, toutes collectivités confondues, que chacun s'accroche à son pré carré, et que les français ne veulent pas que cela bouge ( des "veaux " disait le Général ). Exemple récent de la petite réforme des régions.
Une comparaison avec les pays nordiques ou l'Allemagne eût été un complément intéressant.
Dans ces pays, la cuisine est bonne avec beaucoup moins de cuisiniers.
En France, il faudrait bien entendu supprimer les communes pour ne laisser apparaître que les communautés ( on gardera la mairie pour les apéritifs ) ainsi que les départements ( on gardera les hôtels pour les apéritifs encore et il restera les hôtels des régions - que d'hôtels! - ce qui devrait suffire à loger les élus restants ). J'oublie les parlementaires dont il faudrait réduire significativement le nombre.
Ca va en faire des économies dans la suite de la COP21 !
Et toutes ces économies seront reportées sur le secteur privé ce qui permettra peut être de booster notre PIB avec de la valeur ajoutée plus pertinente économiquement parlant.

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Jeansais le 02/11/2015 à 18:15

36 800 communes, 2 700 intercommunalités sans compter les SIVU ( syndicat intercommunal à vocation unique), les SIVOM (syndicat intercommunal à vocation multiple), les SCOTT, les pôles métropolitains ( attention c'est différent des métropoles)...auxquels il faut bien sûr rajouter les départements ( ou Métropole chez nous), les Régions ( c'est vrai que leur nombre a diminué) ...
Bref ! çà en fait des cuisiniers pour faire mijoter la tambouille...
Mais la France pays du bien mangé et bien boire cultive ses crus, ses clos, ses fromages ...et ses élus locaux !

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Post monétaire le 02/11/2015 à 18:14
SpamBlock a écrit le 02/11/2015 à 14h56

1er post, un spam de Post monétaire :\

1er Spam, votre intervention d'un mec qui n'a rien à dire.

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SpamBlock le 02/11/2015 à 14:56

1er post, un spam de Post monétaire :\

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Post monétaire le 02/11/2015 à 12:35

Mais... sans cette cuisine, y-aurait-il besoin de ces "cuisiniers" ?
Le système s'auto-alimente et s'auto justifie. D'où le sentiment de "hors sol" chez beaucoup de citoyens qui ne votent plus (quand ils sont inscrits) ou votent pour crier "merde".

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