Grandes Écoles : Polémique autour des élèves boursiers

Grandes Écoles : Polémique autour des élèves boursiers

C’est le débat de la rentrée. Le gouvernement souhaite intégrer 30% d’élèves boursiers dans les Grandes Écoles. Quand Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur parle d’ «objectifs», la Conférence des Grandes Écoles (CGE) redoute des «quotas». Une mesure, qui pour cette dernière, nivellerait dangereusement le niveau des élites vers le bas. Mais pour Didier Desplanches, la réflexion n’est pas aussi simple. Le directeur de l’Ecole Catholique des Arts et Métiers (ECAM) de Lyon assure que cette mesure est envisageable, avec du temps et des moyens. Entretien pour Lyon Mag.

Lyon Mag : La CGE craint la potentielle arrivée de 30% d’élèves boursiers. Qu’en pensez-vous ?
Didier Desplanches : Il y a un débat sur les mots utilisés entre la notion de «quotas» et la notion d’ «objectifs». Valérie Pécresse n’a pas annoncé des «quotas» mais des «objectifs», ce qui me paraît assez sain en terme de façon de procéder. Mais il faut toujours se fixer certaines règles de fonctionnement. Personnellement, ça ne me dérange pas de fixer ces 30%, même si on travaille déjà depuis quelques années dans notre école sur la question de l’insertion d’élèves qui ont des moyens financiers plus limités.

La CGE estime que cela pourrait faire baisser le niveau. Qu’en pensez-vous ?
La polémique touche en particulier les écoles qui recrutent sur concours. Je considère que pour notre école, qui recrute sur étude de dossier et par un entretien avec l’élève, cela ne pose pas de problème majeur. Notre objectif est d’accompagner les étudiants le plus longtemps et le plus correctement possible pour les amener à un certain niveau. Sur ce point du nivellement, je ne suis pas tout à fait d’accord, même si nous ne sommes pas les plus légitimes pour l’évoquer spécifiquement, car nous n’avons pas de concours chez nous.



Vous pensez que la CGE se serait emballée trop vite par rapport à cette proposition d’accueillir 30 % d’élèves boursiers qui date de Novembre dernier ?
Je pense que les Grandes Écoles ont déjà fait une partie du chemin. Le fait de fixer un objectif ambitieux dans un temps court provoque des réactions. Mon opinion est qu’il faut toujours fixer des objectifs forts de façon à faire bouger les choses. On aurait fixé un objectif plus limité, on aurait pas forcément mis les moyens pour l’atteindre. Il faut réagir de façon pondérée. Est-ce que ces objectifs sont-ils vraiment atteignables ? Il faut déjà se poser la question. Le deuxième point est de savoir quels sont les moyens que l’on met en oeuvre pour obtenir ces objectifs. Le problème n’est pas le nombre, mais les moyens que l’on met en place.

30%, c’est un trop gros chiffre selon vous ?
Pour certaines écoles, ce chiffre peut être acceptable. Si je regarde les ESC type Grenoble, Toulouse ou Lille, ou la moyenne est autour de 21%, cela ne paraît pas infaisable. Pour certaines écoles qui partent d’un peu plus loin, ces 30% peuvent être problématiques. Il faut toujours regarder cela au cas par cas. Pour l’ECAM Lyon, cet objectif n’est pas absurde, si les moyens sont mis en place.

Au delà du concours, une baisse de niveau diffuse, tout au long de la scolarité, est-elle possible ?
Non, je ne pense pas. C’est une question d’accompagnement de l’école. Qu’est-ce que l’école va mettre en place pour permettre à ces jeunes d’atteindre le niveau ? Au niveau des pédagogies, cela impose aux écoles d’avoir une réflexion pédagogique différente. La difficulté pour l’école est de traiter des cas particuliers. Cela génère des coûts supplémentaires, surtout pour un aménagement particulier, qui n’est pas forcément simple dans une entité. Traiter des cas individuels dans le collectif est toujours un peu délicat. On est dans une société où l’individu prend une place de plus en plus importante, et qu’il faut traiter en tant que tel. La question qui en ressort est : comment aménager nos systèmes de façon à pouvoir permettre à ces personnes, de plus en plus nombreuses, d’avoir un parcours quasiment personnalisé. C’est une des difficultés que nous devons traiter.

Certains directeurs d’écoles, au sein de cette conférence, ne veulent-ils pas faire d’effort ?
Je ne pense pas. Toutes les écoles ont envie de faire des efforts et sont tous partants pour que cette diversité intègre leur école. Il n’y a pas de soucis à avoir sur cette envie de chaque directeur d’école. Ce sont plutôt les problèmes de moyens et de temps qui interpellent les directeurs d’écoles.

Combien d’élèves boursiers y a-t-il à l’ECAM aujourd’hui ?

Nous avons 12% d’élèves boursiers, plus des «quotients familiaux», dont bénéficient les familles dont les ressources ne permettent pas de payer une scolarité entière. Nous allons jusqu’à diminuer les frais de scolarité de 50%. Les deux combinés représentent 20% de nos 780 élèves.

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