Pénurie d’essence : «Total va faire un gros bénéfice avec cette grève»

Pénurie d’essence : «Total va faire un gros bénéfice avec cette grève»

Si les particuliers commencent partout en France à ressentir les effets du blocage des raffineries, les transporteurs de marchandises sont, pour l’instant, relativement épargnés. Mais pour combien de temps encore ? A l’heure où déjà 132 stations-service sont à sec, et avec une estimation d’autonomie de 7 à 10 jours par l’Union française des industries pétrolières, les transporteurs voient pointer en filigrane la perspective d’un assèchement total des ravitaillements à court terme. Pour Philippe Beyan, directeur d'une agence de transports de Corbas, la situation mérite une vigilance prononcée. Avant de tirer la sonnette d’alarme pour de bon ? Interview.

Lyon Mag : En tant que transporteur, êtes-vous touché par les pénuries d’essence ?
Philippe Beyan :
Nous sommes touchés car nous avons quelques soucis pour ravitailler. Les pétroliers sont assez sollicités au niveau de leurs réserves.

Quelle est la situation dans votre entreprise de transports ?

Nous devrions être livrés mercredi après-midi.

Combien de temps d’autonomie vous assure une livraison ?
Six jours tout au plus.

Avez-vous déjà vécu par le passé une situation similaire ?

Nous avons eu à faire à une situation similaire lorsqu’il y a eu un blocage par les conducteurs routiers des raffineries, lors des grèves qui ont touché notre profession.

A cette époque, la situation était plus grave ?

Oui, c’était plus compliqué. Nous avions plus de volume à transporter. Les ravitaillements nous assuraient une autonomie de quatre jours au lieu de six. Si nous n’avons plus de gasoil, nous ne pouvons plus faire rouler nos camions. Et si nous ne pouvons plus faire rouler nos camions, nous ne pouvons plus travailler.

Êtes-vous prioritaire en accès à l’essence pour le transport de certaines marchandises ?
Nous n’avons pas de produits de premières nécessité à livrer. Nous ne livrons pas, par exemple, d’hôpitaux ou plus généralement le domaine médical. Nous ne sommes pas prioritaires.

Au final, vous êtes soumis au même sort que les particuliers ?
Pas tout à fait. Nous avons la chance d’avoir une cuve et une distribution propre. Nous pouvons donc faire un peu de stockage. mais à terme, forcément, nous serons exposés.

Vous avez une livraison demain pour six jours, mais derrière, si le conflit dure, avez-vous prévu la suite ?
Non. Le gasoil se commande au jour le jour, parce que son prix varie tous les jours. A ce sujet, je pense que Total va faire un gros bénéfice par rapport à cette grève. Le gasoil a pris huit centimes du litre en trois jours. Ils ont crée une pénurie, donc automatiquement, il y a une tension sur les prix. Au bout du compte, nous sommes pris entre les deux. Total va vendre son stock huit centimes plus cher que le prix du marché.

En tant que transporteur, vous avez des prix ajustés ?
Nous raisonnons en prix hors taxe. et nous avons bien sur des prix «cuve», qui sont différents des prix «pompe». Nous commandons par 32 000 litres.

Pour le moment, ressentez-vous ce mouvement de grève sur votre activité ?
Pour le moment non. Mais automatiquement, nous avons eu une augmentation du prix du gasoil qui a été effective sur la première commande. Cela jouera de fait sur le bénéfice.

Hormis le prix du gasoil, vous n’êtes pas gêné sur votre chiffre d’affaire par ce mouvement de grève ?
Non. Nous maintenons notre même niveau d’activité. Nous n’avons pas fait de restriction à l’heure actuelle. Je pense que le gouvernement ne se laissera certainement pas déborder par la grève de la CGT. La réaction sera assez rapide, à mon avis, si le conflit devait perdurer.

S’il commence à y avoir des pénuries, les pertes seraient tout de suite énormes ?
C’est bien simple : une pénurie, c’est l’arrêt complet de notre activité.
 

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