Le périscolaire partie 2 : Tous ensembles

Le périscolaire partie 2 : Tous ensembles
Romain Meltz - DR

A Lyon,  63% des 36 200 enfants scolarisés restent à l’accueil périscolaire du vendredi après-midi.

A l’école Saint John Perse dans le 7ème, c’est Emmanuelle qui s’en charge. Elle jongle avec les contraintes : le nombre maximum d’enfants par animateurs présents, les enfants absents, les animateurs présents, etc. En Grande Section, deux groupes à 25 : 4 animateurs, reste 6 places. Pareil en Petite Section.
Mais en Moyenne Section, Emmanuelle gère différemment : un groupe à 25, un à 23, elle additionne: 48. Répartis en 3 animateurs pour 3 ateliers différents et non pas 2 ateliers avec 2 animateurs. En Moyenne Section les 3 ateliers (mini jardin, herbier, jeux en plein air) durent donc 45 minutes chacun.
Au final : trois ateliers pour les Moyennes Sections au lieu d’un atelier de 14h à 16h15 pour les Petits et les Grands. Reste à compter sur quelques absents pour respecter le ratio d’ 1 animateur pour  14 enfants. Pour ce vendredi c’est bon. Emmanuelle soupire de contentement mais plisse immédiatement les yeux.  C’est le mot "mini-jardin". Il lui rappelle qu’il reste quelque chose à régler. Tout en fouillant dans sa mémoire,  elle attrape un petit garçon dans la cour qui imite vaguement un hélicoptère. Un rapide interrogatoire lui permet d’identifier l’atelier où il devrait être. Il a quitté "Sport Collectif" en désaccord avec les règles d’arbitrage pratiqué par son animateur. "On a plusieurs petits ‘brestois’ comme celui-là par journée" commente Emmanuelle. Gentille façon de dire que certains enfants ont du mal à suivre les règles du périscolaire.
Elle croise un groupe de 18 enfants, des plus grands, qui s’en vont à l’atelier Ulti’mots. C’est un jeu de mot avec Ultimate, une autre activité qui existe aussi, qui se joue au frisbee. Ça tombe bien, car Gilles - instit à la retraite-  anime Ulti’mots, l’atelier des jeux de mots. Il y a un peu trop d’enfants plein d’énergie  dans la salle, mais Gilles, sait y faire. Séquence "réunion de famille" Qui se souvient du principe ? Des mains se lèvent (ça reste l’école) "papa robert vient du désert avec son dromadaire", "maman karine met un jean à Ludivine pour qu’elle rime". Dans le feu de l’action Gilles a oublié la présentation de chacun des petits : "Je m’appelle Victoria, j’aime les bégonias", "Je m’appelle Matteo , j’aime bien le vélo". Ça cale au suivant : Mohamed a oublié le sien : "Je m’appelle Mohamed… ma trousse n’est pas laide ?" tente-t-il mais ne reçoit que des moues dubitatives des autres. Gilles a d’autres jeux de mots en réserve, mais il a surtout d’autres projets : "J’aimais mieux les mercredis de Lyon. On sortait tout le temps, sur les berges du Rhône, au Parc de Gerland… Mais en 45 minutes d’activité on n’a pas le temps même si les gamins sont demandeurs. Et puis cette année, comme  c’est la première année, c’est sécurité maximale pour voir comment ça se passe" .

Jusqu’ici à Saint John Perse tout se passe bien. L’école prête ses locaux, prête ses jeux, les relations entre enseignants et périscolaire sont très bonnes. "Un jour on a cassé une de leur perforeuse. Le directeur de l’école m’a dit de laisser tomber. Mais quand même c’était une perforeuse qui faisait des trous en forme de lapin… alors quand on a pu faire des commandes – en périscolaire on a le droit deux fois par an – j’ai commandé la perforeuse et je leur ai rendue".

La réforme des rythmes scolaires a aussi changé la règle. Les vendredis après-midi sont passés de "extrascolaire" à "périscolaire". Le taux d’encadrement imposé aux structures est donc passé de 1 animateur pour 12 enfants à 1 pour 18. Concrètement ça veut dire que les structures périscolaires ont la possibilité de ne pas renouveler des CDD de leurs animateurs puisqu’elles ont moins de besoin.

En parlant, le problème "mini jardin" revient à Emmanuelle. Il faut qu’elle trouve des plantes pour l’atelier les  grandes sections. Atelier en trois temps : visite des jardins du Parc de Gerland, ramassage des pots de yaourts, patouille de la terre et plante du haricot lingot blanc du Canada. Pousse. Merveille pour les Petites Sections, mais ceux et celles des Grandes sont blasés, ils voudraient pouvoir récolter à la fin. Trop tard pour passer commande de plants de tomate cerise, comment en récupérer  sans dévaster un portager ? Emmanuelle se creuse la tête.

Un tout petit groupe d’enfant passe devant elle, des masques anti-peinture sur le nez.

La kermesse a eu lieu vendredi dernier. Ça sentait la merguez cuite pour de vrai et le canard en plastique pour la pêche à la ligne. Au dernier moment l’école a décidé de ne pas faire la kermesse dans les deux cours (maternelle et primaire). Mais par le portail même fermé  j’ai pu voir le graphe presque fini. Raphaël n’est ni un contractuel de la ville de Lyon ni un salarié d’un centre de loisir en statut d’association. C’est un grapheur pro qui a un contrat de quelques heures  pour initier au graphe des petits groupes d’enfants. C’est donc un artiste en contrat avec la ville, pas un animateur.  C’est le boulot de Sandra de piocher parmi les enfants dans leur groupe d’origine 6 qui viendront s’initier au graphe.

J’ai assisté aux premiers coups de bombes, les plus petits faisaient le bas les plus grand le haut. Dans cette kermesse où je n’ai rien à faire, je regarde le graphe presque fini quatre semaines plus tard. On peut presque lire écrit sur le mur, en entier "Tous ensembles."

Romain Meltz
@lemediapol

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3 commentaires
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BDB13 le 28/07/2015 à 11:17

Euh, et sinon, le fait qu' "ensemble" soit un adverbe ici et ne prenne pas de "s", donc, ça ne choque personne ? ;o)

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@lemediapol le 30/06/2015 à 21:48

Oui. Ça demande en effet une explication Gaelle. En fait le mot brestois est utilisé pour ne pas dire "à l ouest". Une variante pour désigner un élève qui n est pas dans son groupe et qui traîne est de dire "tiens un petit planeur" (il n y a pas de feminin). Ç est affectueux.

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Gaëlle le 30/06/2015 à 19:42

D'où vient cette expression "ne fais pas ton petit brestois" ? C'est la première fois que je l'entends ! Et pour les avoir côtoyés de près, je ne vois pas en quoi ils sont différents des petits lyonnais :-)
Sinon, le dernier mot est savoureux !!

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