Pourquoi le Roi Lion a remporté un tel succès ?
Parce que c’est une superbe histoire, une mise en scène spectaculaire, une musique exceptionnelle, comme celle d’Elton John... Et je crois que ça collera parfaitement avec Mogador qui est un lieu extraordinaire. On a d’ailleurs entièrement repensé le théâtre pour l’occasion avec plus de confort, de la climatisation, plus d’espace...
Mais la comédie musicale, ça ne marche pas vraiment en France !
Il y a quand même eu des très grand succès. Mais c’est vrai qu’entre Starmania dans les années 70 et Notre-Dame de Paris à la fin des années 90, il y a eu un gros passage à vide, mais est-ce que la qualité était toujours au rendez-vous ? C’est vrai aussi qu’en France, il n’y a pas cette culture des comédies musicales comme dans les pays anglo-saxons. Mais le groupe Stage Entertainement s’est dit qu’il n’y avait pas de raisons que ça marche partout, sauf en France.
Avec des prix entre 45 et 99 euros la place, c’est encore un spectacle grand public ?
Oui. Surtout quand on regarde les prix délirants qui sont parfois pratiqués pour certains concerts. En plus, sur tous les pays qui proposent “Le Roi Lion”, on est les seuls à ne pas dépasser les 100 euros. Mais surtout, vu le spectacle, ce n’est pas cher payé. Le rapport qualité-prix est excellent. Quand on ressort au bout de trois heures de danse
et de chant, on se dit qu’on en a eu pour son argent ! Il faut rappeler que chaque soir, il y a 40 artistes sur scène, 17 musiciens, une cinquantaine de techniciens... Bref, c’est une grosse machine. Ce qui justifie le prix de la place.
Le Roi Lion pourrait être présenté à Lyon ?
Non, car il n’y a pas de salles qui peuvent accueillir ce spectacle. Par contre, on est en train de monter des opérations avec la SNCF, des tours-opérateurs et des entreprises d’autocars pour proposer des packs spéciaux aux Lyonnais avec le transport et le spectacle. J’y tiens beaucoup, d’autant plus que je suis très attaché à cette ville où j’habite toujours aujourd'hui.
Comment vous avez pris la tête du théâtre Mogador ?
En fait, je dirigeais jusque-là “Connaissance du monde” qui est une vieille institution familiale spécialisée dans les vidéo-conférences permettant de découvrir des pays, des régions... J’avais même investi dans cette PME pour tenter de la rénover et la relancer ; mais à la suite d’un différend sur la stratégie avec la famille propriétaire, j’ai quitté Connaissance du Monde. Stage Entertainement m’a alors proposé de devenir directeur de Mogador qui est un des trois plus grands théâtres privés de Paris. Un challenge extraordinaire qui ne se refuse pas ! Même si je suis sans doute le seul directeur de théâtre en France qui n’a pas d’expertise culturelle ou artistique. Mais le groupe propriétaire de Mogador voulait avant tout un manager et un développeur. Car aujourd’hui, Mogador, c’est plus qu’un théâtre : on joue Le Roi Lion de 20 à 23 heures, donc il reste 21 heures par jour pour de l’événementiel, des séminaires, des congrès, des lancements de produits... Il y a un fantastique marché à prendre. D’ailleurs, on a déjà monté plusieurs opérations, notamment avec le groupe Publicis qui a entièrement réservé le théâtre pour inviter ses clients.
Les théâtres sont condamnés à évoluer ?
Je pense que oui. Aujourd’hui, il y a une convergence entre salles de spectacles et salles de congrès. Car la vocation d’un théâtre ne peut plus être seulement d’accueillir des pièces de théâtre. Il faut être polyvalent, organiser des expos, des séminaires, des manifestations... C’est la recette de demain.
C’est un exemple à suivre pour le théâtre public ?
Le théâtre public s’inscrit dans une autre logique. Son objectif n’étant pas la rentabilité.
Pourquoi le théâtre privé n’est pas plus développé à Lyon ?
C’est en partie historique. Paris est une ville de spectacles. Mais même à Paris, certains théâtres privés ont du mal à atteindre l’équilibre sans subventions. C’est pour cela qu’il faut souligner le remarquable travail de Jacqueline Boeuf à la tête du seul théâtre privé lyonnais : le Théâtre Tête d’Or. Mais c’est compliqué de ne dépendre que de la billetterie. Il faut s’adapter, trouver d’autres recettes. On peut notamment s’inspirer des stades de foot qui ont choisi de faire du “naming”, c’est-à-dire de prendre le nom d’une grande entreprise ou d’une grande marque, contre une redevance. D’ailleurs, un théâtre comme Mogador pourrait très bien adopter cette démarche.
Vous seriez prêt à revenir travailler à Lyon ?
C’est vrai que je me sens avant tout Lyonnais. Aujourd’hui, je suis à fond dans cette aventure de Mogador. Mais si un jour, on me propose un challenge intéressant, pourquoi pas ?
Propos recueillis par Laurent Sévenier
l.sevenier@lyonmag.com