Le maire d'Albigny s'accorde des permis express pour son terrain

Ainsi, le premier magistrat d'Albigny a, avant les élections et le risque de perdre son siège, expédié deux dossiers importants à ses yeux. Le 23 mai dernier, Jean-Paul Colin signait un permis de démolir pour une maison particulière située à une adresse familière. Forcément, c'est la sienne... Bénéficiaire : Jean-Paul Colin. Signataire de l'acte : Jean-Paul Colin. Une forme d'économie circulaire.

Quelques mois plus tard, la démolition étant actée sans coup férir, c'est à son premier adjoint, Gilbert Convard, qu'il confie le soin de répondre favorablement à une nouvelle demande du citoyen Jean-Paul Colin. Ce dernier veut maintenant construire une nouvelle maison sur les ruines de l'ancienne.

Contacté par téléphone, le maire d'Albigny se défend : "Ce n'est pas illégal". Et il ajoute : "Je n'ai jamais signé de permis de construire me concernant".

L'arrêté du 15 octobre dernier montre que c'est bien le premier adjoint au maire qui a signé la décision d'accorder le permis. Or, le Code de l'Urbanisme dans son article L422-7 (Livre IV, celui qui parle des "constructions, aménagements, démolitions"), stipule : "Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision".

Pour résumer, le maire ne peut pas désigner lui-même l'un de ses adjoints pour le suppléer dans la délivrance du permis de construire qui le concerne. Jean-Paul Colin aurait dû passer par le conseil municipal. Ce qui n'a pas été fait.

Est-ce que le citoyen lambda d'Albigny bénéficie des mêmes facilités administratives que l'édile ?

Jean-Paul Colin n'en est pas à son premier fait d'armes. En 2017, il s'était fait remarquer pour des frais de bouche, notamment pour sa propension à soutenir l'activité des restaurateurs du coin avec l'argent des contribuables. Le maire semblait avoir table ouverte à l’Auberge de Poleymieux, où les ardoises se multipliaient, toutes essuyées par la municipalité. Avril-mai 2015 : 58 repas (1141,50 euros), juin-juillet : 13 repas (439 euros), août-septembre : 41 repas (1182 euros). Tous les deux mois un relevé.

Heureusement, le comptable était vraiment cool. Il laisse passer des factures qui ne portaient pourtant aucune des mentions légales obligatoires : SIRET, RCS. Le restaurant La Table d’Albigny était également sollicité : 328 euros en juillet-août, 653 euros en novembre 2016. Par une pudeur qui l’honore, le restaurateur n’indiquait même pas le nombre de repas qu’il a servis.

On ne dédaignait pas non plus les endroits branchouilles comme Les Planches : 340 euros en juin-juillet. À cela s’ajoutait des achats de denrées alimentaires et des vins fins (dont 60 bouteilles de champagne) au Cellier Neuvillois dont on s’étonnait qu’elles n’aient pas été portées sur le budget Fêtes et Cérémonies.

Connaissant son goût pour les belles choses, on ne doute pas que la nouvelle maison de Jean-Paul Colin saura se montrer à la hauteur de sa réputation.