A Lyon, la marche à la réforme du lycée est lancée

A Lyon, la marche à la réforme du lycée est lancée
Photo d'illustration - LyonMag

Hélène est élève en 1ère S, née en 2002. Elle sait depuis longtemps qu’elle passera, en juin 2020, les épreuves de sciences de son bac S.

Maud est en 2de, née en 2003. Pour cause de réforme du bac, il n’y aura plus de filière à la rentrée de septembre 2019. Elle a déjà fait les choix de ses trois enseignements de spécialité pour sa 1ère : humanités + géopolitique et science politique + langues et cultures de l’Antiquité. Elle sait qu’en plus de ses trois choix, elle suivra l’année prochaine, en 1ère, un enseignement scientifique.

Mais une des choses qu’elle ne sait pas encore, c’est qu’elle passera au bac ses épreuves de science AVANT son amie Hélène qui a un an de plus une classe au-dessus. Dès mars 2020 (pile dans un an) Maud passera son épreuve de bac science en contrôle continu, dans son lycée, deux mois avant Hélène qui passera ses épreuves de sciences du bac réformé en juin 2020.


Consciente que cette réforme du lycée a de quoi surprendre, l’académie de Lyon entame sa communication sur le sujet.


Adieu aux filières… (ou presque)


Les élèves de seconde ont déjà rendu les vœux d’enseignements de spécialité à suivre en 1ère en septembre prochain. Les séries S, ES et L disparaissent donc. Mais s’ils le veulent, les élèves pourront à peu près les reconstituer. Par exemple, Marie, qui a choisi Physique-Chimie + Mathématiques + Biologie suivra une 1ère qui ressemblera beaucoup à une 1ère S actuelle.

"Pour l’instant j’ai environ 80% d’élèves de seconde qui sont restés dans l’optique des anciennes filières", témoigne un chef d’établissement lyonnais. "Cela voudrait dire que l’on aura 20% d’élèves qui choisissent une combinaison nouvelle [ndlr: par exemple : Arts + Littérature Classique + physique chimie] c’est très encourageant, ça veut dire qu’ils se sont appropriés l’essence de cette réforme qui est de prendre en compte leur souhaits", se réjouit la Rectrice Marie-Danièle Campion.


De fait, par certains côtés, cette réforme fait très années 80. A l’époque Lionel Jospin voulait "remettre l’élève au cœur du système". En 2019 on s’en rapproche : "j’ai fabriqué mes emplois du temps en commençant par les enseignements de spécialité. J’y mets des élèves qui viendront de différentes classes de troncs communs (Français, Histoire, Enseignement Scientifique, langues). Donc j’ai prévenu mes enseignants : ne faites pas de vœux d’emploi du temps pour la prochaine rentrée, tout va tourner autour des emplois du temps des élèves", explique en souriant un proviseur.

Autre espoir très fin des années 80 : en finir avec la domination de la série scientifique. A l’époque, passer de Terminale C à Terminale S n’avait visiblement pas fonctionné. Le nouveau plan, pour y arriver, est donc de sortir les math du tronc commun et de prévenir qu’"à moins de 14 de moyenne en maths en seconde, on ne vous conseille pas de choisir les maths en enseignement de spécialité", ce qu’on entend, parait-il, dans les classes de seconde actuellement.

Cela va-t-il fonctionner ? A priori, sans filière, il n’y a pas de raison que la filière S continue à dominer.  Et la disparition des maths du tronc commun va faire des heureux.  Comme Amandine, élève en seconde, qui était partie pour une 1ère ES. Sans filière, elle va choisir comme enseignements de spécialité : Histoire-Géographie + Sciences économiques + Anglais.

Ça l’arrange bien car elle détestait les maths.


"On change le système", se réjouit encore Marie-Daniele Campion, la Rectrice. "De logiciel", rajoute Yves Flammier, chef du service d’information et orientation du rectorat.
Pas sûr. Quitte à changer, on pouvait changer beaucoup de choses dans le lycée français. Et en profiter pour en finir avec la distinction entre bac technologique et bac général puisque tout est maintenant une question d’enseignements de spécialité.

"Le panachage a été imaginé mais pas retenu. Finalement le constat est que la voie technologique fonctionne très bien, et qu’il y avait déjà eu des éléments de réforme récemment, donc on n’y touche pas", résume Yves Flammier. Avec la réforme, si le lycée technologique a l’air de fonctionner comme le général (tronc commun + enseignements de spécialité) en fait les enseignements de spécialité recopient les anciennes filières.

Un bac "remusclé"


Autre occasion manquée : la réforme du bac. L’objectif en ce domaine était de le "remuscler". Derrière une formule qui sonne particulièrement faux, se cache déroulé incroyable. Maud va bientôt découvrir que le bac va se prolonger de décembre de son année de 1ère à juillet de son année de terminale.

Un an et demi où la Maud de 1ère passera une première série d’épreuves de bac Histoire et Langues, trois mois après la rentrée, dans son établissement, mais avec des copies anonymes et des sujets à la disposition des proviseurs.

Trois mois plus tard (en mars de l’année de 1ère) ça sera de nouvelles épreuves du baccalauréat, avec en plus l’enseignement de spécialité que Maud va abandonner pour l’entrée en terminale.

Et ça continuera en Terminale où des séries d’épreuves du bac auront lieu à partir de février, de nouveau en avril, et puis en juin. Le bac, loin d’avoir été remusclé, semble s’être encore alourdi.


Espoirs


Que les formes de ce futur bac modifié ne soient pas encore connues n’effraye pas du tout Catherine Vercueil – doyenne des Inspecteurs pédagogiques académique : "Le programme Humanités est construit pour qu’on y entre par les compétences, il ne dépend pas de la forme que prendra l’examen baccalauréat", explique-t-elle.  Emmanuelle, (prof de français) va enseigner cet enseignement dès septembre.  Elle le partagera avec un prof de philo et s’interroge: "deux profs en Humanités, mais pas de co-animation. Des progressions impérativement communes mais pas d’heures possibles de concertation. C’est un nouveau métier qui se profile". Catherine Vercueil balaie l’inquiétude : "nos enseignants savent faire face à cela".


A vrai dire, la partie la plus rassurante de cette réforme tient peut-être à ce qu’elle va demander comme réactivité aux enseignants. Le nouvel enseignement "Langues et culture de l’Antiquité" s’appuie sur le riche vivier des profs de Latin et Grec.

Qu’en est-il du tout nouveau (par rapport au latin) enseignement "Numérique et Informatique" ? Un appel à candidats a été lancé dans toute l’académie. Plus de 80 candidatures ont été retenues. Des profs de sciences majoritairement, qui suivent depuis une formation sous l’égide de l’Université Lyon 1 comprenant plusieurs sessions de formation pendant les vacances et complétées par des séances à distance (MOOC).

Au final, le train de la réforme du lycée sera peut-être sauvé par ses enseignants, c’est un comble.

@lemediapol

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8 commentaires
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La France en marche le 01/04/2019 à 18:17
Nostromo a écrit le 01/04/2019 à 17h40

Bof, le lycée et les facs sont massacrés de façon continue depuis 1981 dans le but d'amener 80% d'une classe d'age à des études qui ne valent plus rien.
Pas de quoi être surpris par cette fin de cycle qui amènera cette fois 100% de la population à un niveau qui sera obtenu sans réel examen.
Toute la perversité de ce système c'est que les familles aisées et bien insérées dans le système continuent à placer leurs enfants dans des filières ultra sélectives par des voies souvent privées.
Le fossé se creuse ainsi sans cesse entre les élites copieusement détestées et les autres qui végètent dans des formations poubelles.
40 ans après, je ne sais toujours pas si les socialistes des années tonton le savaient et ont été assez cyniques pour en profiter, ou s'ils étaient sincères et naïfs.
Quoi qu'il en soit, le résultat est que l'éducation nationale est plus inégalitaire que jamais.

Restons aussi con qu’on en a l’air . On sera au moins égal à nous meme .

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Nostromo le 01/04/2019 à 17:40

Bof, le lycée et les facs sont massacrés de façon continue depuis 1981 dans le but d'amener 80% d'une classe d'age à des études qui ne valent plus rien.
Pas de quoi être surpris par cette fin de cycle qui amènera cette fois 100% de la population à un niveau qui sera obtenu sans réel examen.
Toute la perversité de ce système c'est que les familles aisées et bien insérées dans le système continuent à placer leurs enfants dans des filières ultra sélectives par des voies souvent privées.
Le fossé se creuse ainsi sans cesse entre les élites copieusement détestées et les autres qui végètent dans des formations poubelles.
40 ans après, je ne sais toujours pas si les socialistes des années tonton le savaient et ont été assez cyniques pour en profiter, ou s'ils étaient sincères et naïfs.
Quoi qu'il en soit, le résultat est que l'éducation nationale est plus inégalitaire que jamais.

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Tiers-monde français le 01/04/2019 à 14:05

La France c’est le Zimbabwé en plein air .le grand retour en arrière est arrivée. Vivez l’ecole A la maison
Et les cours particulier,tous ses profs aux chômdûs. Sa leur fera les pieds et à nous des économies colossales.

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Post monétaire le 01/04/2019 à 12:58

Ha cette fameuse guerre pour le fric....

faire des économies en faisant des "réformes"...

niveler par le bas l'éducation pour que "faire des argumentaires construits" soit rendu impossible...

niveler par le bas pour légitimer qu'il y ait "des chefs, qui eux, savent"....


A l'ENA, ou dans les grandes écoles, on ne nivelle pas par le bas, pourquoi ? :o)




[je ne réponds dorénavant qu'aux citoyens s'étant connectés (en haut à droite de la présente page) avec un pseudo relié à un mail (pseudo écrit en bleu dans le forum LyonMag). C'est ainsi que les personnes assument mieux leurs écrits parce que s'il y a un problème, on peut les retrouver et avoir un suivi de conversation constructif]

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jean aimarre le 01/04/2019 à 12:08

je me marre

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bonsens le 01/04/2019 à 07:10

un but avoué est de faire des économies pour l´épreuve du bac, la plupart des esneignants ne seront plus gratifiés pour des corrections de copies. Ils auront plus de travail, payés moins.

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L'arriviste le 31/03/2019 à 23:15

Il est évident qu'en faisant en sorte de pourrir les emplois du temps des enseignants, ces derniers vont pouvoir encore mieux s'investir...

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pekval69 le 31/03/2019 à 22:19

Et oui ! Terminé les emplois du temps sur 2jours et demi...

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