Schmitt : "Je ne sais pas jouir du succès"

Schmitt : "Je ne sais pas jouir du succès"

“Oscar et la dame rose” du Lyonnais Eric-Emmanuel Schmitt, qui est joué jusqu'au 21 mai au Théâtre Tête d’Or, va être adapté au cinéma.

Ce que raconte “Oscar et la dame rose” ?
Eric-Emmanuel Schmitt : C’est une histoire d’amour entre un petit garçon de 10 ans, gravement malade, et une vieille femme. Ce qui permet de parler de la mort, de la maladie, du temps qui passe... Mais toujours avec humour et imagination. Et le succès de cette histoire m’a dépassé puisque le livre s’est vendu à plus d’un million d’exemplaires. Car cela parle de façon légère, décomplexée et drôle de la maladie et de la mort. Comme la vie est une tragédie, ce n’est pas la peine d’en écrire.
Vous n’êtes pas très optimiste !
Au contraire, je suis un optimiste. Mais je connais les difficultés du monde : sa douleur, son injustice, sa cruauté... mais je m’en accommode. Devant un mystère, le pessimiste a des angoisses. Moi j’ai confiance.
Pourquoi vous n’avez pas réalisé vous-même la mise en scène ?
Parce que mon obsession de tout maîtriser fait qu’à la fin je me sens plus frustré que réellement épanoui. Je l’ai bien vu quand j’ai mis en scène “La tectonique des sentiments” en début d’année. Au fond je suis un homme d’écriture parce que je la contrôle. Je suis d’ailleurs capable d’appeler un imprimeur à 5 heures du matin pour stopper l’impression d’un de mes livres pour changer un mot.
Alors pourquoi vous réalisez des films ?
Parce qu’un film, c’est aussi un travail d’écriture. Sauf qu’on utilise une pellicule à la place du papier. Alors qu’au théâtre, on écrit sur l’eau. Ça ne laisse pas de traces. A moins de contrôler le moindre geste, la moindre respiration... D’ailleurs, malgré mes appréhensions, le tournage de mon premier film, “Odette Toulemonde”, s’est très bien passé.
Vous allez réaliser un autre film ?
Oui, je vais justement adapter “Oscar et la dame rose” avec Michèle Laroque dans le premier rôle. Et le tournage débute en octobre à Bruxelles.
C’est risqué d’adapter un succès au cinéma ?
Oui, mais j’ai toujours pris des risques. Une fois un journaliste m’a dit que j’allais de sujet casse-gueule en sujet casse-gueule sans me casser la gueule. Et c’est vrai car j’ai écrit des livres sur Hitler, sur Jésus, sur la mort d’un enfant... Mais c’est un mélange d’audace tranquille et d’insatisfaction permanente.
C’est une fuite en avant ?
En fait je ne sais pas jouir du succès. Dès que je m’arrête, je culpabilise et je me sens inutile. Au fond, j’ai toujours besoin de me prouver quelque chose.
Vous n’êtes jamais fier d’un succès ?
J’envie ceux qui sont satisfaits d’eux-mêmes, tout en me moquant d’eux. Je suis fier quand je touche mon public, comme avec “Oscar”. Et je suis fier quand les gens me croisent dans le rue et me disent “merci”. C’est merveilleux pour un auteur, mais ça ne me rassure pas.

“Oscar et la dame rose” d’Eric-Emmanuel Schmitt, mis en scène par Danièla Bisconti. Avec Jacqueline Bir. Du 15 au 21 mai au Théâtre Tête d’Or, 60, avenue du Maréchal de Saxe. Tarifs de 26 à 38 euros. Tél. : 04 78 62 96 73 ou www.theatretetedor.com

La critique
Emouvant
Seule sur une scène vide, une vieille dame est adossée à un grand fauteuil en cuir. Cheveux blanc, chemise orange, tee-shirt rose, la comédienne Jacqueline Bir, qui vient d’annoncer qu’elle allait sans doute arrêter sa carrière à 74 ans, se lance dans un grand numéro d’acteur qui va durer 1h30. Elle interprète tous les personnages de cette histoire d’Eric-Emmanuel Schmitt, mettant en scène un enfant de 10 ans leucémique qui se sait condamné. Mais ili se prend d’affection pour Mamie Rose, une vieille visiteuse de malades qui arrive à lui rendre le sourire. En lui proposant un jeu : écrire une lettre quotidienne à Dieu en imaginant la vie qu’il ne vivra jamais. Du coup, on découvre les rêves de cet enfant qu’on voit peu à peu vieillir et se rapprocher de la mort. Alors qu’on rit beaucoup au début, l’ambiance se tend progressivement. Et l’émotion devient ensuite très forte. Un grand moment de théâtre.

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