21 octobre 2010, place Bellecour, Lyon : un anniversaire sous tension

21 octobre 2010, place Bellecour, Lyon : un anniversaire sous tension
LyonMag

Me Bertrand Sayn et plusieurs membres du Collectif du 21 octobre tenaient mercredi une conférence de presse. Un an après les émeutes urbaines de Lyon, le collectif vise à dénoncer la souricière mise en place le 21 octobre à Bellecour pour bloquer tout mouvement de foule. Seul hic : certaines personnes retenues n’appelaient qu’à rejoindre une manifestation légale, quelques mètres plus loin, place Antonin-Poncet. Retour sur un couac.

Jeudi 21 octobre 2010. A l’appel de syndicats étudiants et lycéens (UNEF et UNL) soutenus par les organisations traditionnelles, une manifestation doit s’élancer de la place Antonin-Poncet (2e) en début d’après-midi, pour rejoindre la place Guichard (3e). Une initiative dans la continuité du mouvement syndical de la rentrée 2010, fortement mobilisateur (près de neuf manifestations entre septembre et octobre) autour de la question des retraites.
Mais depuis le début des émeutes urbaines, jeudi 14 octobre, la place Bellecour sert de lieu de ralliement à des populations disparates : casseurs, lycéens, étudiants.
Ce jeudi 21 octobre, un camion lanceur d’eau, utilisé traditionnellement pour disperser les regroupements, un hélicoptère de la Gendarmerie Nationale ainsi que près de 600 officiers (policiers, CRS, GIPN) sont réquisitionnés pour boucler et surveiller Bellecour, qui cristallise les tensions.
Petit à petit, les forces de l’ordre cloisonnent l’endroit. Impossible de sortir, alors que jusqu’à 14h, la police y laisse entrer des personnes. Les lycéens et étudiants qui souhaitent rejoindre leurs camarades à quelques mètres de là, place Antonin-Poncet, n’y sont pas autorisés. Au compte-goutte et en montrant patte blanche, certains arrivent à rejoindre le cortège qui s’élance aux alentours de 15h30. Pour près de 300 personnes, il faudra attendre jusqu’à 19h pour évacuer Bellecour. Après avoir été pris en photos pour certains et obligés de présenter leurs papiers d’identité pour tous. Une première.

« On a coupé une manifestation de gens qui n’avaient rien à voir avec les fauteurs de troubles »

« Cette voie de fait a eu pour effet de priver les plaignants personnes physiques de leur liberté d’aller et de venir, et de priver l’ensemble des parties civiles de leur droit de participer à une manifestation pacifique, précise dans son dépôt de plainte l’avocat du collectif Bertrand Sayn. Ce faisant, les organisations syndicales et les partis politiques appelant à la manifestation ont également subi un préjudice, la rétention de plusieurs centaines de personnes au moment du départ du cortège les privant d’une partie de leur effectif. »  Une vingtaine d’associations qui composent le collectif, ainsi qu’une quinzaine de personnes physiques se sont constituées parties civiles en juillet dernier, pour faire la lumière sur ce que l’avocat estime être  « une garde à vue à ciel ouvert de plusieurs centaines de personnes. » L’ordonnance de conciliation a été reçue par les plaignants et la désignation du juge d’instruction devrait intervenir sous peu. 
« La mesure mise en place est manifestement illégale, continue Me Sayn. Il est interdit de garder des gens en un lieu précis en les empêchant de se déplacer, si ces derniers ne s’apprêtent pas à commettre une infraction. » C’est vraisemblablement le cas des manifestants bloqués qui souhaitaient rejoindre le cortège place Antonin-Poncet. Mais la manœuvre policière a sans doute permis d’immobiliser des personnes aux intentions moins louables. L’argument, qui relève de la précaution, n’est pas recevable pour le Collectif du 21 octobre. « On a coupé une manifestation de gens qui n’avaient rien à voir avec les fauteurs de troubles », expose Bertrand Sayn. Si le collectif assure que « ce jeudi 21 octobre était une belle journée pour manifester », il ne faut pas oublier que 47 personnes ont été interpellées ce jour-là, avec des bris de voitures Rue St-Hélène (2e) et Rue Salomon Reinach (3e).

« Contrôles au faciès et vexations », selon le Collectif du 21 octobre

L’avocat dénonce également « l’exfiltration discriminatoire de la place Bellecour » effectuée « au faciès » par les policiers. « Ces quelques heures ont été très dures, continue-t-il. Le bruit des pales de l’hélicoptère en vol stationnaire au dessus de la foule, le double cordon de CRS empêchant toute sortie... » Françoise Chalons, militante NPA, se fait l’écho des vexations qu’ont du souffrir les pris au piège de Bellecour. « Certains voulaient aller satisfaire leur besoin, rapporte-t-elle. ‘Si vous avez la vessie pleine, faites en un ballon et allez-vous amusez avec’ ont alors rétorqué les policiers. »
Une violence verbale mais également physique, puisque l’atmosphère se crispant à mesure, certains manifestants s’en sont pris au CRS en jetant des pavés. Réplique des forces de l’ordre. Charges, gaz lacrimogènes. « Cette violence a fait l’objet d’une saisie du défenseur des droits », précise Bertrand Stayn. Pourquoi ne pas l’avoir inclue au dépôt de plainte ? « Si on voulait avoir une chance que l’instruction avance, il fallait réduire les motifs de constitution de la partie civile », justifie-t-il. Idem pour le fichage photographique des prisonniers de Bellecour. Si la police assure avoir détruit l’ensemble de ces fichiers, l’avocat a saisi la CNIL pour faire toute la lumière sur la légalité de la procédure.

Manifestation vendredi place Bellecour, conférence samedi à la Bourse du Travail

En attendant que le processus judiciaire aille jusqu’à son terme, les membres du collectif fêteront l’anniversaire de l’évènement vendredi à Lyon. La joie en moins. « Beaucoup sont encore traumatisés par cette expérience », confesse Yves Bleton, représentant la fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE). Le collectif réinvestira dès vendredi la place Bellecour de 18h à 21h. « Pour dire haut et fort que la lutte continue », précisent-ils. De la musique, une exposition photo autour de l'évènement, mais également des projections auront valeur de témoignage.
Le lendemain, c’est une conférence suivie d’un débat à la Bourse du Travail avec Evelyne Sire-Marin (vice-présidente de la LDH), Gilberto Pagani (membre de l’association des avocats démocrates) et Bernard Sayn qui marquera la fin des festivités d’un triste anniversaire pour Lyon : celui d’une ville livrée à la fureur et au désarroi de sa jeunesse. Et si la « garde à vue à ciel ouvert » du 21 octobre, dénoncée par le collectif, avait aussi servi à préserver ces derniers d’autres formes de violences subies ?

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5 commentaires
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Samuel le 11/02/2014 à 17:15

"Et si la « garde à vue à ciel ouvert » du 21 octobre, dénoncée par le collectif, avait aussi servi à préserver ces derniers d’autres formes de violences subies ?" Completement démago donc. En contradiction donc avec l'info ici : http://www.actualites.fr/info/eurochallenges

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lyonnais le 20/10/2011 à 17:38

comme "Lyonnais" nous ne pouvons que remercier la Police d'avoir fait leur travail.

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Lyonnais le 20/10/2011 à 17:15

Collectif du 21 = Extrême Gauche
C'est de la manip, on a vu l'état de la ville avec ces émeutes. Alors merci la police d'avoir bloquer sur Bellecour ces barbares.

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Ainay le 20/10/2011 à 08:22

100 % d'accord

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Observator le 19/10/2011 à 17:21

Ces idiots utiles au système ne se rendent même pas compte que sous prétexte de défendre leurs intérêts, ils facilitent la casse et le pillage.
S'ils avaient eu un brin de convictions pour l'intérêt général, ils auraient renoncé à manifester à partir de la Place Bellecour ce jour là et trouver d'autres moyens de manifester et contester la loi.
Mais pour certains, il faut croire que la casse et le pillage sont des éléments essentiels à leurs revendications, ça fait plus puissant !!!

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