La Gréco contre vents et marées à Fourvière

La Gréco contre vents et marées à Fourvière
Juliette Gréco aux Nuits de Fourvière - LyonMag

La muse de Saint-Germain-des-près Juliette Gréco s’est produite mardi soir dans le Grand Théâtre des Nuits de Fourvière malgré une interruption de 40 minutes.



La dame a 85 ans. Sa vie est un roman qui traverse l’histoire du pays de l’Occupation à nos jours. Sur scène avec elle, il y a Vian, Sartre, Brel, Gainsbourg, même Miles Davis. Ce n’est pas du grand spectacle, ça s’écoute, les paroles ont souvent du génie. La musique est assurée par un accordéon et un piano à queue sur lequel joue Gérad Jouannest, l’époux de Gréco. Patrimoniale.
Quand elle arrive entre les colonnes antiques de Lyon, devant un amphithéâtre plein aux trois quarts, c’est dans une longue robe noire lourde mais aérienne.  Elle commence par les chansons de son dernier album, ode aux ponts de Paris. Les textes ont été écrits par des écrivains, les couplets sont donc très longs. Marie Nimier lui a offert Pont Marie, avec cette définition du pont : « ça se traverse et c’est beau », sous-entendu comme la vie. Jean-Claude Carrière a livré Mirabeau sous le Pont, où bien sûr il est question d’Apollinaire, puis Le Contre-Ecclésiaste, dans laquelle « rien n’est vanité ». Elle distille également du Léo Férré, l’une de ses découvertes, avec Jolie môme, puis du Gainsbourg, déjà, avec Accordéon, aux faux airs de guinguette des bords de Marne. Ajouté aux postures de Gréco et à sa voix grave et profonde, le tableau est intéressant. Surtout quand arrive la candide Un Petit Poisson Un Petit Oiseau et  la carrément érotique Déshabillez-moi. Brel aussi est présent, avec notamment la très énergique Mathilde. Mais voilà, ce soir là,  la technique avait décidé de jouer les trouble-fêtes.

Le micro grésillait, et parfois s’éteignait quelques secondes, souvent d’ailleurs pendant les refrains. « Qu’est ce qui pète là ? » s’interrogea Juliette Gréco avec détachement. L’incident devint plus inquiétant pendant l’interprétation de C’était bien, car là le son disparut totalement pendant plus longtemps. Dans la foulée, après des huées de l’assistance indignée contre la régie, un membre de l’équipe vint au milieu de la scène, pris Juliette Gréco par la main et s’excusa de devoir interrompre le spectacle 20 minutes pour raison technique, avant de ramener la chanteuse lentement vers la coulisse, sous cette fois-ci une salve d’applaudissements destinée à la chanteuse teinté de sifflets contre la technique. Il était 22h17. L’ « entracte » en question durera 40 minutes. Le concert reprendra après un passage au micro du directeur des Nuits de Fourvière Dominique Delorme, qui précisa qu’un problème imprévu de son du à l’humidité avait nécessité un « miracle » de la part des techniciens et que Juliette Gréco avait très envie de reprendre. L’amphithéâtre l’ovationna quand elle fît son retour sur l’estrade. Elle ne dira plus un mot entre les chansons.
Cette deuxième partie bien involontaire a fait la part belle aux auteurs de la vie de Gréco. Bruxelles, de Brel, Avec le Temps, de Férré. Place ensuite à Gainsbourg, avec une chanson écrite pour elle, par amour : La Javanaise. Enchaînée avec le même Gainsbourg pour La Chanson de Prévert, elle aussi écrite pour elle à l’époque où celle qui joua dans Belphégor à la télévision interprétait Les Feuilles Mortes, de Jacques Prévert, mise en musique par Joseph Kosma. Juliette Gréco tente aussi la mythique Ne me quitte pas, puis J’arrive, chanson adressée à la mort. Elle quittera le projecteur de poursuite braqué sur elle de bout en bout en saluant le public, debout pour la raccompagner. Et debout si sincèrement qu’il le restera jusqu’à la faire revenir saluer, seule, à trois reprises. A 85 ans. Dominique Delorme pouvait venir lui remettre un gros bouquet. Quelques coussins ont même atteint la scène.

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6 commentaires
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Condoléances à la famille le 24/09/2020 à 12:17

Une époque qui se meurt et disparaît avec elle . Paix éternelle à cette femme libre.

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Michel Yves le 24/09/2020 à 06:39

Oh elle va nous manquer la Gréco....

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Serge G le 23/09/2020 à 21:27

Adieu madame. C’était bien

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Jean-Michel le 05/07/2012 à 22:47
jm a écrit le 04/07/2012 à 20h22

L'accueil de Juliette Gréco, c'est le symbole de la culture à Lyon, beaucoup de com, des gens de talent et une organisation foireuse très contente d'elle-même.

Les organisateurs qui travaillent à ce festival "apprecieront" votre commentaire, monsieur Jerome M

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jm le 04/07/2012 à 20:22

L'accueil de Juliette Gréco, c'est le symbole de la culture à Lyon, beaucoup de com, des gens de talent et une organisation foireuse très contente d'elle-même.

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Pierre le 04/07/2012 à 02:06

le son, une honte!
Bravo à juliette Gréco quand même, et dire que je l'avais ratée sur scène au siècle passé à l'Olympia...

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