Collomb tourne la page le Bec en offrant un établissement de nuit à Larose !

Collomb tourne la page le Bec en offrant un établissement de nuit à Larose !
Gérard Collomb, Jean-Christophe Larose et Jean-Paul Viossat - Montage LyonMag et DR

Depuis le début du mois de septembre, les soirées du Selcius à la
Confluence tournent à plein. Dancefloor après 23h et jusqu’au bout de la
nuit, le champagne coule à flot et on voit régulièrement sur le quai
Rambaud les notables lyonnais, élus, chef d’entreprises dépenser sans
compter.

Cette étrange incursion dans le monde de la nuit n’était pourtant pas évidente pour l’établissement du PDG de Cardinal, Jean-Christophe Larose. Car Gérard Collomb, qui a toujours surveillé de près l’avenir du site, dictant parfois la voie à emprunter, avait d’abord refusé de voir autre chose qu’un restaurant dans ces murs maudits de la Confluence.

Que s’est-il passé pour que le Selcius bénéficie d’un tel revirement de situation ? Et dans quel but ? LyonMag.com a mené l’enquête pour mettre au jour une affaire qui dure depuis plusieurs années et qui engage la responsabilité de quelques figures lyonnaises.

L’ex Rue le Bec est le domaine réservé du maire de Lyon. Il s’était entiché à l'époque d’un jeune cuisinier breton, Nicolas le Bec, au caractère bien trempé dont tout le monde s’accordait à reconnaitre un certain génie culinaire, mais encore trop inexpérimenté pour s’occuper d’un établissement d’une telle superficie.
Collomb le bâtisseur, qui ne supportait pas que les acteurs lyonnais de l’immobilier boudent son chantier de la Confluence, demanda à Jean-Paul Viossat, directeur de Voies Navigables de France et à Jean Christophe Larose, qui démarrait dans la promotion immobilière, de faciliter l’implantation d’une brasserie gastronomique. Cette dernière serait confiée à Nicolas le Bec à qui il faudra apporter toutes les facilités économiques, compte tenu du manque de surface financière du chef.

Un homme tenta à l’époque de raisonner le maire de Lyon. Mais Jean-Pierre Gallet, directeur général de la SEM Lyon Confluence et en charge du développement du quartier, n’arrivera jamais à se faire entendre sur la tournure que devait prendre la pointe de la Presqu’ile. Le duo Jean-Paul Viossat et Jean-Christophe Larose, aidé par la Caisse d’Epargne d’Olivier Klein et secondé par la Caisse des Dépôts, sera alors de presque tous les deals. Pour le meilleur et pour le pire !

L’épisode Le Bec : des pertes de plusieurs millions d’euros !

Dans un premier temps, la réhabilitation du quartier démarre avec l’implantation du Progrès et la rénovation des bâtiments existants, dont celui des Salins, vaste espace de 2000 m2 qui ne se prête pas vraiment aux activités commerciales. Déjà à l’époque, peu d’acteurs comme Paul Bocuse ne croyaient à sa réussite, compte tenu de la configuration des lieux, des travaux à réaliser, et de son emplacement trop enclavé.
Mais Gérard Collomb avait trop besoin de la Confluence pour envisager sereinement une seconde mandature.

C’est là qu’intervient le pion Le Bec en 2009, aidé par ses bonnes fées : les établissements publics VNF par l’intermédiaire de Jean-Paul Viossat, la Caisse des Dépôts et la Caisse d’Epargne d’Olivier Klein qui lui apporteront, ainsi qu’à Cardinal, des moyens financiers extraordinaires sans aucune caution et aucune garantie pour préserver leurs propres intérêts et ceux des Lyonnais, puisque de l’argent public est parfois mis dans la balance.
"Nicolas Le Bec n’a pas vu où il a mis les pieds, nous soutient l’un de ses proches. Il a été la victime d’un mouvement d’argent colossal qui ont permis à certains de s’enrichir au-delà du normal".
Une éventuelle magouille actuellement dans le viseur de la justice lyonnaise…

Après un démarrage plutôt réussi grâce à la qualité du restaurant et la curiosité des Lyonnais pour ce nouveau quartier, l’équilibre financier n’est pas trouvé. La SCI des Salins dirigée par Jean-Paul Viossat accepte pourtant que les loyers ne soient pas réglés par Le Bec entre juillet 2008 et fin décembre 2010 (le bail est à retrouver en intégralité et en exclusivité ici) ! La suite est connue : liquidation judiciaire, fournisseurs restés sur le carreau, des pertes de plusieurs millions d’euros… Tout le monde a fait l’autruche dans ce dossier pour ne pas froisser Gérard Collomb et ses partenaires d’infortune.
"Jean-Paul Viossat ne nous a pas alerté et nous faisions confiance à nos associés de la SCI des Salins, se défend un cadre de la Caisse des Dépôts. Nous avons peut-être été un peu légers dans cette affaire".
De leur côté, Jean-Christophe Larose et Jean-Paul Viossat avaient tenté de sauver les apparences. Ce qui a peut-être trompé les fournisseurs sur la capacité financière de la Rue Le Bec. En vain…

Jean-Christophe Larose reprend la main

Commence alors le bal des repreneurs pour le fonds de commerce. Tous ont une condition : obtenir de la mairie de Lyon et la préfecture la possibilité de devenir un établissement de nuit, capable de rapporter beaucoup d’argent. Refus catégorique de Collomb !
Jean-Christophe Larose se porta un temps repreneur de l’établissement auprès de l’administrateur mais se retira rapidement, compte-tenu de son état d’actionnaire, même très minoritaire de la SCI des Salins.
"J’étais intéressé par la reprise mais on m’a vite fait savoir que je n’étais pas le bienvenu. J’ai préféré me retirer", nous explique un restaurateur reconnu de Lyon, conscient que le casting était pipé.
Contre toute attente, une seule  offre, dérisoire, fut déposée pour l’ancienne Rue Le Bec, menée par le chef étoilé Christian Têtedoie avec un concept original de cabaret festif qui aurait préservé les emplois en danger de l’établissement.

C’est lors du traditionnel repas de rentrée avec les journalistes en août 2012 que Gérard Collomb dit publiquement tout le mal qu’il pensait du projet de Têtedoie. "Ça ne convient pas et je vais passer des coups de fil. Je ne veux pas que des cars entiers de touristes débarquent à la Confluence pour tout bloquer", avait indiqué le maire qui obtiendra, comme toujours, gain de cause dans les jours qui suivent.
Mais l’avis du tribunal de commerce sera plus fort et Christian Têtedoie remportera la mise pour monter son restaurant, les Salins. La SCI des Salins, à travers Jean-Paul Viossat, imposera alors le pur respect du bail commercial, à savoir pas d’activités de discothèque.

L’actuel chef de l’Antiquaille connaîtra aussi un revers car la SCI des Salins ne faisait plus cadeau du loyer. Et l’établissement de la Confluence échouera finalement quelques mois plus tard dans les bras de Jean-Christophe Larose qui se vante alors d’accepter sur demande de son ami Gérard Collomb. Les Salins étaient morts, le Selcius était né.

Parallèlement, une procédure est engagée par la justice pour contraindre Voies Navigables de France,  la Caisse d’Epargne et la Caisse des Dépôts à combler le passif de la Rue Le Bec estimé à 4 ou 5 millions d’euros. Larose fait part à ses proches de sa volonté de créer un établissement de nuit, contre l’avis initial de Gérard Collomb. Le bail ne le permet pas mais Jean-Paul Viossat, qui engage Voies Navigables de France, assure qu’il ne s’y opposera pas, et la Caisse des Dépôts n’est pas consultée.

Il manque alors l’autorisation de la préfecture qui repose en grande partie sur les constatations des services sécurité et cadre de vie de la mairie de Lyon, validées par la police. Après la réélection de Gérard Collomb en mars dernier, les services de la mairie vont accepter en catimini l’autorisation tardive.
Sans passer par la case commission, le dossier est entériné et le fonds de commerce de Jean-Christophe Larose se voit valoriser de plusieurs millions d’euros. Alors qu’il ne l’avait racheté que pour 250 000 euros… La machine à fric est lancée.

Pour  faire tourner le Selcius, il convoite la clientèle du Docks 40, établissement de nuit voisin où il est actionnaire minoritaire du fonds de commerce. Et dont son frère Sylvain Larose vient de se faire révoquer de son statut de patron par le Tribunal de commerce de Lyon suite à un contentieux mené par EG Events*, actionnaire du fonds de commerce et propriétaire des murs qui dénonce la gestion opaque de l’établissement. Sylvain Larose intègre immédiatement le Selcius et entraine avec lui une partie de la direction du Docks 40.

Le coup fatal viendra de la rénovation d’un ancien portique de conteneurs juste à côté du Docks 40, obligeant la fermeture de la terrasse de l’établissement rival pour trois mois cet été.
Dans le même temps, le Selcius ouvre ses propres places au soleil et peut remercier Rhône Saône Développement, la filiale de Voies Navigables de France à l’origine des travaux impromptus estimés à 800 000 euros et qui est dirigée par le même Jean-Paul Viossat. Pour rappel, ce dernier cumule également avec le poste de gérant de la SCI des Salins, propriétaire des murs du Selcius.
Le conflit d’intérêts est tout proche.

Gérard Collomb, victime de ses largesses avec Larose et Viossat ?

Malgré ces nouvelles rentrées d’argent liquide, la situation financière de l’établissement continuerait encore d’alerter la Caisse des Dépôts. Via son nouveau directeur régional, de nombreuses questions sont posées à Jean-Christophe Larose, qui, selon nos informations, pourrait avoir entamé les démarches pour s’exiler au Luxembourg.

L’ex grand argentier du PDG de Cardinal, la Caisse d’Epargne, a par ailleurs fermé ses robinets à financements. "Porter plainte, on y pense, concède un cadre de la direction. Mais nous ne voulons pas porter préjudice à Gérard Collomb et surtout à notre ancien directeur régional Olivier Klein. Pour le moment on reste spectateurs". Il faut dire qu’Olivier Klein, aujourd’hui à la tête de la BRED Banque Populaire, traine encore comme des boulets les prêts sans garantie accordés à ses amis de la Confluence.

Comme le Musée des Confluences mais à moindre échelle, l’ex Rue Le Bec est un gouffre financier que les hommes politiques ont tenté par tous les moyens de combler. Argent public, abus de pouvoir et alliances frauduleuses pourraient être légions dans ce dossier.

Un collaborateur à la Ville de Lyon qui connait bien l’affaire nous informe de l’omerta totale autour de ce sujet toxique. Et termine par un laconique : "Collomb est fou, ca peut lui exploser à la figure…"
Le sénateur-maire, qui aurait pris ses distances avec le PDG de Cardinal, payera-t-il l’ambition démesurée des frères Larose  tandis que Nicolas Le Bec se relance lui avec son nouvel établissement du côté de Shanghai ?

Alexis André

*EG Events est une filiale d’Espace Group, propriétaire de LyonMag

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60-110 sur 65 commentaires
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Vauté Laimouthon le 05/11/2014 à 09:18

Quoi !!! Des hommes politiques et des hommes d'affaires se goinfrent d'argent public pour satisfaire leur égo et remplir leur portefeuille.
On ose y croire.

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Tkia le 05/11/2014 à 09:12

Le contenu est à vomir, l'article est super. bravo LyonMag de taper dans la fourmilière Collomb !

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andreper le 05/11/2014 à 09:08

la rose ne sent pas toujours bon!
mais le monde politique est toujours au parfum...

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ca suffit le 05/11/2014 à 09:06

Tout ce beau monde : dehors !

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abdg le 05/11/2014 à 07:35

collomb lui fait gratuit ????

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