Portrait : la longue marche de Michel Havard

Portrait : la longue marche de Michel Havard

Après la démission de Perben du conseil municipal, Michel Havard, un député UMP de 41 ans, devient le principal opposant à Gérard Collomb. Portrait.

Assez grand, maigre, cheveux bruns coupés court, costume gris... Michel Havard c'est plutôt du genre à passer inaperçu. Courtois et toujours souriant, il paraît même assez raide, voire assez mal à l'aise. Mais il a réussi à s'imposer en douceur dans la vie politique lyonnaise en quelques années. Et après avoir évolué dans l'ombre d'Henry Chabert puis de Dominique Perben, il est désormais en première ligne. "Sarkozy surveille toujours de très près ce qui se passe à Lyon et il a décidé de parier sur lui pour les prochaines municipales", affirme même un vieux gaulliste. Ce que ne dément pas Havard même s'il estime que c'est "prématuré". Mais qui est donc cet élu discret ?

Son histoire, c'est d'abord celle d'une famille pied-noir qui a dû fuir l'Algérie en catastrophe après y avoir vécu pendant quatre générations. Son père en gardera toujours une certaine rancÅ“ur vis-à-vis du général de Gaulle qui avait suscité de faux espoirs chez les pieds-noirs avec son "Je vous ai compris". Et son fils en gardera une certaine méfiance vis-à-vis de la classe politique. Sa famille débarque à Clermont-Ferrand avec quelques valises. Ils ont tout perdu. Son père étant commissaire des renseignements généraux et sa mère intendante de lycée, le jeune Havard va parcourir la France au gré de ses mutations. Cherbourg, Aurillac, Toulon... Pas le temps de s'attacher à une ville. Mais il se souvient d'une enfance heureuse. Car chaque week-end, avec son frère aîné et sa petite sÅ“ur, il se défonce sur les terrains de sport. Foot, tennis, basket...

Commissaire de police
"Mes parents nous encourageaient surtout à être travailleurs et responsables." En revanche, chez les Havard, on parle beaucoup politique. Sa mère, de sensibilité centriste, vote Giscard avant de souhaiter "du changement" et voter François Mitterrand. Mais le fils regarde tout cela de loin, car son rêve, c'est de devenir commissaire de police comme son père. Du coup, après avoir emménagé à Pierre-Bénite, il se lance dans des études de droit. Mais cet étudiant va surtout faire la fête et il finira par arrêter. Alors que ses parents s'installent à Montpellier, cet étudiant assez dilettante prend un virage. Après son Deug de droit, il mène de front Sciences-Po et un Dea de droit européen. Mais il s'intéresse aussi de plus en plus à la politique. Surtout à l'Europe. Du coup, il va lancer Europe Infos, une association d'information pour les étudiants. Et c'est au cours d'un forum qu'il fait une rencontre décisive. Celle d'Henry Chabert, alors député européen centriste et adjoint de Noir à l'urbanisme. A l'époque, ils échangent à peine quelques mots et leurs numéros de téléphone. Car Havard, qui a 22 ans, rêve toujours d'être commissaire. C'est à peine s'il a suivi les élections municipales de 1989 où il a voté Michel Noir parce qu'il représentait le changement face au vénérable Francisque Collomb. Puis il va faire son service militaire à l'école des officiers de réserve de La Valbonne dans l'Ain. Une période qu'il va mettre à profit pour faire le point. Et à son retour, il décide de se lancer en politique. Du coup, il renonce à présenter le concours d'entrée de l'école de police de Saint-Cyr-au-Mont-d'Or. Après quelques mois dans un cabinet anglais spécialisé dans la gestion de fortune, il travaille pendant trois ans comme consultant dans une société lyonnaise qui aide les entreprises à décrocher des aides européennes.

Mais tout s'accélère pour Havard en 1995. Mis en examen pour avoir fait financer sa carrière politique par son gendre Pierre Botton qui a détourné cet argent de ses entreprises, Michel Noir ne peut pas se représenter aux élections municipales. Henry Chabert reprend en catastrophe le flambeau. Et il demande à Havard de se lancer dans le 5e arrondissement où la maire sortante, Marie-Thérèse Geffroy, a décidé de prendre ses distances avec Noir pour rejoindre la liste UDF-RPR menée par Raymond Barre. Après une fusion des listes entre les deux tours, il deviendra adjoint chargé du commerce. Chabert va aussi le recruter comme collaborateur de son groupe au Grand Lyon puis comme son assistant parlementaire.

Ce qui va lui permettre de se constituer un réseau solide. Et de se faire une réputation. "Bosseur et loyal" pour les fidèles de Chabert. "Un petit soldat sans état d'âme" pour le PS. Mais six ans plus tard, même scénario aux élections municipales de 2001. Cette fois, c'est Chabert qui doit se retirer car il a été mis en examen pour avoir fait rénover sa résidence secondaire de la Drôme par des entrepreneurs qui travaillaient avec la Communauté urbaine. La droite se déchire entre Michel Mercier qui a pris la tête d'une liste UDF-RPR et Charles Millon qui veut se relancer après que son alliance avec le FN lui a coûté son poste de président du conseil régional. Sollicité des deux côtés, Havard refuse de choisir ente les deux listes. "J'ai alors sérieusement pensé à arrêter la politique", se souvient ce jeune élu qui rentre alors à la Saur, une filiale de Bouygues spécialisée dans le traitement de l'eau dont le siège pour l'est de la France est à Ecully. Sa mission : identifier les contrats qu'il faut renégocier suite aux regroupements de nombreux villages en syndicats intercommunaux. Une mission à la fois politique et technique où il couvre plus de 25 départements.

Accrocheur
Mais le break est de courte durée. En 2002, Jean Girma, un élu RPR de Pierre-Bénite qui est chargé de réorganiser la droite lyonnaise après la claque des municipales, lui propose de reprendre du service. Objectif : s'implanter dans le 5e arrondissement où les deux sÅ“urs ennemies, la gaulliste Marie-Thérèse Geffroy et la milloniste Bernadette Isaac-Sibille, se sont retirées après la victoire aux municipales de la socialiste Alexandrine Pesson. Et quand Dominique Perben débarque à Lyon en juin 2003, Michel Havard le rejoint rapidement. Du coup, il tourne enfin la page Henry Chabert qui tente alors un retour en politique à Villeurbanne après avoir purgé sa peine d'inéligibilité. Mais surtout, il va créer la surprise aux élections cantonales de mars 2004 où il se présente contre la maire socialiste du 5e arrondissement, qui est favorite. Au soir du premier tour, il a d'ailleurs 800 voix de retard. "Pour moi, ce n'était pas rattrapable. Le PS a dû faire le même calcul. Sauf que moi, je n'ai pas baissé les bras !" Résultat : Havard bat Besson et devient conseil général à 37 ans. Une victoire qui lui permet de s'imposer comme un jeune espoir de cette droite lyonnaise encore déboussolée. Et il va se distinguer en étant un des seuls élus à critiquer ouvertement le dérapage du musée des Confluents lancé par Michel Mercier. Dans la foulée, Sarkozy qui veut renouveler les cadres de l'UMP le nomme secrétaire départemental et Havard va jouer un rôle clef pour redynamiser l'UMP qui compte près de 10 000 adhérents dans le Rhône. Un record.

Mais il va à nouveau créer la surprise aux élections législatives de 2008. "J'ai senti que j'avais une carte à jouer quand j'ai vu Anne-Marie Comparini, la députée sortante, suivre à fond Bayrou qui durcissait son discours. Du coup, j'étais certain qu'elle allait se marginaliser. Mais je ne savais pas qui avait le plus de chances de l'emporter. Thierry Braillard, le candidat de la gauche, ou moi." Il sera élu alors que deux circonscriptions de droite tombent à gauche avec Emmanuel Hamelin battu dans la 2e et Dubernard qui sera éliminé dans la 3e. Là encore, Havard confirme son statut de jeune espoir.

Manque de charisme
En revanche, les élections municipales de 2008 se passent beaucoup moins bien. Logiquement Havard prend la tête de la liste Perben dans le 5e arrondissement. Mais il est sévèrement battu. Ce qui ne le surprend pas. Même s'il a fait semblant d'y croire pendant la campagne. "Sur le terrain, même les électeurs de droite nous expliquaient qu'ils

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