Hôpital de la Croix Rousse : quand l'impression 3D sert à la reconstitution de la mâchoire

Hôpital de la Croix Rousse : quand l'impression 3D sert à la reconstitution de la mâchoire
Reconstruction d'une mandibule via la modélisation 3D - Hospices Civils de Lyon

L'hôpital de la Croix Rousse présentait ce mardi une nouvelle technique chirurgicale, utilisant l'impression en 3D, pour reconstituer l'os de la mâchoire.

Utilisée pour la première fois en 2015 dans un hôpital niçois, cette technique fait à ce jour l'objet d'un travail de thèse. "Si on n'en parle qu'aujourd'hui, c'est parce que l'on a pu mesurer l'efficacité de la technique. Maintenant on pratique cette méthode sur tous les patients qui peuvent en bénéficier", a déclaré le professeur du service d'ORL de l'hôpital Croix Rousse, Philippe Céruse, lors du point presse de présentation. Pratiquée à quinze reprises, cette nouvelle pratique a, pour l'heure, toujours fait ses preuves. Celle-ci consiste à assembler des morceaux d'os de péroné, préalablement sélectionné via logiciel 3D, pour reproduire une nouvelle mâchoire.

Une mâchoire assemblée "tel un puzzle" à partir de morceaux d'os du péroné

Avant toute chose, un scanner du crâne du patient (auquel une partie de la mâchoire est manquante) est fait. Cette absence de mandibule (os de la mâchoire) est, dans la majeure partie des cas, due à une nécrose (pourriture de l'os), un cancer ou bien un accident. Le scanner est ensuite envoyé à une société de modélisation 3D spécialisée qui va créer, à partir de là, des guides de coupe osseuse ainsi que des plaques en titane. Les guides, placés sur le péroné du patient (os de la jambe sur lequel sera prélevé des morceaux qui serviront à reconstituer la mâchoire) dicteront au chirurgien un "plan de découpe des morceaux de péroné. Ceux-ci seront ensuite assemblés pour former la forme voulue. Le modèle 3D permet alors de créer un miroir du côté sain ", explique le professeur. Ensuite, tel un puzzle, les os sont rattachés à la mâchoire grâce aux plaques en titane : "l'os se ressoude alors naturellement autour de six mois après. Les plaques sont toutefois très rarement enlevées" précise Philippe Céruse.

Auparavant, sans cette technologie de patrons en trois dimensions, les chirurgiens opéraient à tâtons. Prélevant de la même manière des échantillons d'os du péroné, le chirurgien devait alors modeler la mâchoire lors de l'opération. Ce qui n'offrait bien évidement pas les mêmes résultats.

Une technique valant encore cher mais offrant de nombreux avantages

Pour le professeur, l'avantage premier d'une telle pratique est d'abord celui du gain de temps : "on gagne plus d'une heure d'opération". Avec ce mode opératoire, l'assemblage de la mâchoire ne dure plus que trente minutes contre deux heures auparavant. De plus : "une fois l'opération passée, il n'y a pas besoin de suivi particulier. Les patients peuvent reprendre une vie normale directement après. Seuls les gens étant auparavant sous traitement ou étant déjà suivi seront suivis tout au long de leur vie. C'est le cas par exemple pour les patients atteints de cancer", tient à faire remarquer Philippe Céruse. La précision de cette technique permet également pour le patient un résultat fonctionnel et esthétique optimisé. Il se trouve qu'un certain rejet social était ressenti par les personnes dont la mandibule venait d'être reconstituée : "ces patients étaient souvent perçus comme les gueules cassées des temps modernes", constate le docteur du service ORL de l'hôpital, Carine Fuchsmann.

Il se trouve néanmoins qu'une telle opération a un coût mais surtout "un surcoût à hauteur de 2 000 euros ! Ce surcoût est couvert à l'hôpital Croix Rousse par les Hospices Civiles de Lyon mais la plupart des hôpitaux français ne peuvent pas se le permettre. C'est d'ailleurs à cause de cela que l'hôpital lyonnais est, pour l'instant, le seul à proposer cette nouvelle méthode dans la région Auvergne-Rhône-Alpes", observe Philippe Céruse.

Rosa témoigne après avoir retrouvé sa mandibule droite grâce à la modélisation 3D

Rosa, âgée de 72 ans, a bénéficié d'une reconstitution de la mâchoire le 8 septembre 2017. Opérée en 2012 de plusieurs nodules (anomalies) devenues tumeurs cancéreuses, elle a alors suivi 33 séances de radiothérapie en moins de deux ans. Ce nombre de radiothérapie, jugé "standard" par le professeur, a suffi pour déclencher une radio nécrose chez la dame âgée. En somme, le côté droit de sa mâchoire a commencé à pourrir suite à ces séances : " Je ne pouvais pas manger sans avoir des douleurs. Et, jour après jour, ma mâchoire se mettait à craquer de plus en plus à tel point que j'en suis arrivée à pouvoir m'enlever mes propres dents", raconte Rosa. De plus, celle-ci a mis plus d'un an et demi avant de vouloir consulter. Craignant l'opération, elle a tout de même dû se faire opérer au risque de voir sa peau à son tour attaquée.

Elle ne savait alors pas qu'elle faisait parti des rares personnes à avoir bénéficié du nouveau mode opératoire via modélisation 3D. Satisfaite du résultat visuel et ne remarquant aucune douleur, elle souligne tout de même le fait qu'il lui aura fallu "trois à quatre mois pour retrouver une vie normale".

Rosa a bénéficié d'une reconstruction de la mâchoire - LyonMag

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