Sylvain Cormier, avocat Innocence Project Lyon : "S'assurer que les condamnations contestées ne soient pas critiquables"

Sylvain Cormier, avocat Innocence Project Lyon : "S'assurer que les condamnations contestées ne soient pas critiquables"
Sylvain Cormier - LyonMag

Sylvain Cormier, avocat spécialisé en droit pénal, était l’invité ce vendredi de Jazz Radio pour l’émission Ça Jazz à Lyon, proposée en partenariat avec LyonMag.

Sylvain Cormier lance ce vendredi "l’Innocence Project à la française", à l’Université Lyon III. Cette association, née aux Etats-Unis, il y a 20 ans, s’attache à démontrer l’innocence de personnes condamnées à tords. Depuis sa création elle a permis de rectifier 300 erreurs judiciaires.
"L’innocence Project est un regroupement pluridisciplinaire d’avocats, de procureurs, d’experts, de policiers, de professeurs de droit, d’étudiants.  Ils ont décidés de travailler ensembles pour mettre en place ce que l’on pourrait qualifier de ‘quatrième recours’. Il s’agit de s’assurer que les condamnations définitives contestées ne soient pas susceptibles de critiques."

A l’heure actuelle, aucune autre association de ce type n’existe en France ?
"L’idée d’Innocence Project France est de reprendre le modèle américain dans le but de pérenniser un système qui a fait ses preuves. La branche américaine est d’ailleurs dotée d’une charte assez précise, qu’elle nous impose."

Quelles sont les affaires sur lesquelles il faudra refaire une enquête et comment contacter les condamnés, qui clament leur innocence ?
"On ne peut pas solliciter les condamnés. Ils doivent se manifester. Plusieurs solutions s’offrent à eux. Que leur entourage les mette au fait de l’existence du projet, leur permettant ainsi d’entrer en contact avec nous. La deuxième possibilité est d’envoyer des formulaires en prison pour savoir qui conteste sa condamnation."

Quels sont les critères qui entraineront la réouverture d’un dossier ?
"Une lecture approfondie du dossier nous permettra de faire un premier tri entre les contestations recevables et celles qui nous paraitront fantaisistes. Il y aura forcément des sollicitations mensongères ou erronées. L’un des critères principaux serait la faisabilité de l’enquête, le nombre de possibilités concrètes d’action pour démontrer une innocence. Y a-t-il des scellés ? Ont-ils été conservés ?"

Il y aura des avocats, des spécialistes, des étudiants mais aucun magistrat. Ont-ils peurs d’être mis en cause dans les défaillances du système ?
"Pas encore, j’espère que la conférence de ce vendredi aidera à les convaincre…"

On a le sentiment qu’en France, la justice a du mal à reconnaître ses erreurs de jugement dans les affaires d’assises. Depuis 1945, seul huit procès ont été révisés…
"Si on analyse les révisions accordées en correctionnelle, c'est-à-dire pour les affaires moins graves, le système fonctionne assez bien. La justice reconnaît ses erreurs et révise assez régulièrement les jugements de tribunaux correctionnels qui se seraient trompé. Dans les cours d’assises, il y a manifestement un blocage qui peut s’expliquer par sa gravité. Plus l’erreur est grave, plus elle est difficile à reconnaître. Il est cependant évident qu’aujourd’hui, les huit erreurs reconnues à la date du 20 décembre 2012 (acquittement de Marc Machin), ne regroupent pas toutes les erreurs judiciaires commises. C’est insupportable !"

Pourra-t-on arriver à des dizaines, voire des centaines d’acquittements, comme cela s’est fait aux Etats-Unis ?
"En France, les obstacles sont de deux ordres. Premièrement, les scellés sont très mal conservés. Comment faire analyser l’ADN si le scellé est abîmé ou a disparu ? Deuxième obstacle, les huit affaires révisées en presque 70 ans démontrent une pratique judiciaire trop restrictive".

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