Drogue : Alerte à la MDMA

Le 28 novembre, le tribunal correctionnel de Lyon a jugé deux trafiquants accusés d’avoir importé une substance très dangereuse. De plus en plus utilisée par les jeunes fêtards.

Fin novembre, le tribunal correctionnel de Lyon a jugé un réseau qui revendait de la MDMA. Une première dans la région où les saisies de cette drogue particulièrement dangereuse sont extrêmement rares. En fait, la MDMA est un des principaux composants de l’ectasy que les trafiquants coupent avec d’autres produits, généralement du lactose. Mais les dealers se sont aperçus que la demande était de plus en plus en forte pour cette MDMA pure, en comprimé ou en poudre. Ce qui décuple ses effets. Dangereux car cette amphétamine a été mise au point par l’armée allemande pendant la première guerre mondiale pour déshiniber ses soldats. Aujourd’hui, les fêtards s’en servent pour améliorer leurs performances sexuelles ou pour danser jusqu’à l’épuisement, la fameuse “danse de la mort”. Un médecin lyonnais reconnaît que cette “pilule de l’amour” a de plus plus en plus de succès notamment chez les jeunes. D’autant plus que son prix est relativement abordable. 55 euros pour un gramme, le prix d’une bouteille de whisky en boîte.
Mais parfois, ça se termine très mal. Comme d’autres drogues, la MDMA provoque un “retour” qui plonge le toxico dans un état dépressif. Ce qui peut conduire certains au suicide.

Concentrée à 93%

Mais, dans la région, les saisies de MDMA pure sont encore extrêmement rares, alors qu’on trouve partout des pilules d’ectasy. D’où l’intérêt de ce procès qui va permettre de mieux cerner ce phénomène.
L’affaire commence par un simple contrôle de routine des douaniers postés au péage de Nangy, près d’Annemasse, sur l’autoroute A40 Mâcon-Genève en Haute-Savoie. Ce 22 décembre 2006, à 7h du matin, ils immobilisent un poids lourd immatriculé en Belgique. Mais ce qui les surprend quand le chauffeur ouvre la porte, c’est la forte odeur de cannabis qui se dégage de la cabine. Consommation personnelle ou chargement mal camouflé ? En tout cas, les fonctionnaires se lancent aussitôt dans une fouille approfondie du camion. Le chauffeur tente alors de prendre la fuite, à pied. En vain, car il le rattraperont rapidement. Mais ils devront complètement vider le camion pour découvrir, planqués derrière des canapés, une douzaine de cartons contenant 75 kg de cannabis, 3 kg d’héroïne et plus de 30 000 cachets d’ectasy. Bref, une belle prise. Vu la quantité saisie, l’affaire est confiée à Annick Corona, juge d’instruction à la JIRS, cette juridiction interrégionale basée à Lyon, chargée des affaires de grand banditisme. Une saisie assez banale car la région est une plaque tournante pour les dealers qui s’approvisionnent en Hollande ou en Espagne.

Mais quelques semaines plus tard, le laboratoire de la police scientifique d’Ecully révèle au juge d’instruction que l’héroïne, qu’ont cru saisir les douaniers, est en fait la fameuse MDMA, avec un taux de concentration exceptionnelle de 93% ! A titre de comparaison, les comprimés d’ectasy saisis dans ce même camion ne contenaient que 36% de cette substance. Trois kilos de MDMA qui auraient pu permettre de réaliser des dizaines de milliers de prises car seuls quelques grammes suffisent pour “partir”.

Des morts en série
Le chauffeur Gavino de Luca, un ancien carrossier devenu poissonnier, explique avoir transporté ces canapés de Belgique vers l’Italie “pour rendre service”. Mais il a déjà été impliqué dans plusieurs affaires de vols d’automobiles. Et les enquêteurs sont convaincus que ce n’est pas la première fois qu’il transporte ce genre de canapés. Ils reconstituent donc son itinéraire : après avoir rejoint Rome en avion, il a récupéré sa marchandise venue de Hollande pour la convoyer en France. L’examen de ses téléphones portables permettra de découvrir qu’il a voyagé toute la nuit en passant des SMS à un correspondant qui le suivait de près. Une escorte pour ce précieux chargement évalué à près de 300 000 euros. Bien sûr, ce complice a pu prendre la fuite discrètement au moment du contrôle. Mais les enquêteurs ont  déterminé que ce réseau avait également des ramifications en Espagne, au Portugal et au Luxembourg. Ce qui leur permettra aussi de remonter jusqu’à un autre Italien, Antimo Sollazzi, soupçonné d’être le commanditaire.

Impliqué dès le début des années 90 dans une affaire de blanchiment d’argent, il va être interpellé à Isernia, son petit village, situé entre Rome et Naples. Mais il niera toute implication dans cette affaire, en restant silencieux face aux questions des policiers. Les perquisitions à son domicile vont se solder par un échec. Ce qui lui permettra d’être remis en liberté. Pourtant le cerveau de ce trafic a sans aucun doute joué un rôle essentiel.

“On s’attend à d’autres saisies car ce marché se développe rapidement” avoue un policier lyonnais. Alors qu’un médecin de la région qui s’est spécialisé dans le suivi des toxicos redoute le pire. “Au Canada et en Angleterre, la MDMA a provoqué des morts en série chez les fêtards. Et ça m’étonnerait que le phénomène épargne Lyon.”

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