“Nécessaires”
Chirurgien orthopédique, Jacques Caton défend les dépassements d’honoraires.
Comment vous justifiez les dépassements d’honoraires ?
Jacques Caton : D’abord, le coût des actes chirurgicaux n’a pas été réévalué depuis 20 ans ! Du coup, les remboursements proposés ne correspondent pas à la valeur réelle des actes. Et si l’assurance maladie ne veut pas payer, il faut bien que ce soit quelqu’un d’autre : les assurances complémentaires ou les patients. Car sans ces compléments d’honoraires, les médecins mettraient tout simplement la clef sous la porte.
Mais ces dépassements sont de plus en plus importants !
Mais nos charges aussi augmentent beaucoup : les frais de personnel, d’équipements, de loyers... Donc il faut bien qu’on augmente nos tarifs pour continuer à faire vivre nos cabinets qui sont de véritables PME. De plus, nos cotisations sociales ne sont pas prises en charge par l’assurance maladie, contrairement aux médecins de secteur 1. Ce qui renchérit nos frais de 30 %. Enfin, il est reconnu que les médecins de secteur 2 soignent moins de patients que ceux du secteur 1 car ils leur consacrent plus de temps.
Mais les revenus des médecins augmentent chaque année !
Oui mais pas de façon importante. Et ils ont baissé en 2005 avec la mise en place du parcours de soins coordonnés. Notamment pour des spécialités comme les dermatologues ou les endocrinologues. Il faut savoir qu’un chirurgien fait quand même 17 ans d’études, commence à travailler tard. Ce qui explique ses tarifs plus élevés. Mais au final, je ne crois pas qu’en taux horaire, on soit mieux payés que des plombiers !
Reconnaissez que certains médecins abusent vraiment !
Mais si le médecin est dans une spécialité rare, qu’il a plus de 60 ans, qu’il est réputé... c’est normal qu’il pratique des honoraires importants. La qualité, ça se paie !
Mais il est censé appliquer ces dépassements avec tact et mesure !
Mais le tact et la mesure, c’est au médecin de l’évaluer. Et personne ne peut dire que c’est deux, trois, ou cinq fois le tarif sécu ! Car si on pratique à Paris ou à Lyon, on n’aura pas la même clientèle qu’à Montluçon ou Saint-Etienne. Ni les mêmes charges !
En tout cas, les patients n’ont plus vraiment le choix !
Mais c’est faux. Les médecins de secteur 2 font plus de la moitié de leurs actes au tarif sécu. C’est-à-dire sans dépassement. Un chiffre que j’ai obtenu difficilement auprès de l’assurance maladie. Car dans les faits, les médecins adaptent leurs dépassements au profil du patient, à ses revenus, à sa couverture sociale, sa mutuelle... Et ils ne refusent pas de prendre en charge ceux qui ne peuvent pas payer ces dépassements. Comme ceux qui bénéficient de la CMU. Mais du coup, les patients plus riches paient pour les plus pauvres...
Vous êtes contre le plafonnement des honoraires ?
Tout à fait. Est-ce qu’on aurait l’idée de plafonner les prix dans un grand restaurant ? La médecine est un secteur d’activité comme un autre. Et si on limite nos tarifs, on sera obligés de licencier du personnel, au détriment du patient. Il faut que l’assurance maladie soit davantage mise à contribution mais surtout les assurances complémentaires qui réalisent chaque année des bénéfices importants.