Sécheresse : "Il faut dépasser les frontières"

Sécheresse : "Il faut dépasser les frontières"

Vice-président de la communauté urbaine chargé du développement stratégique, Jean-Yves Sécheresse doit préparer l’élargissement de cette institution. Une mission difficile car de véritables baronnies se sont constituées à ses frontières.

Les frontières actuelles de la communauté urbaine vous paraissent adaptées ?
Jean-Yves Sécheresse : Avec 1,4 million d’habitants, la communauté urbaine de Lyon peut se faire entendre en France et en Europe. D’autant plus qu’on est passé de 55 à 57 communes avec Givors et Grigny qui viennent de nous rejoindre. Mais c’est clair que le territoire actuel ne correspond plus à sa zone d’influence. Il y a un certain nombre de villages limitrophes qui devraient logiquement faire partie de l’agglomération qui rayonne en réalité sur quatre départements : le Rhône mais aussi l’Ain, l’Isère et la Loire.
Vous pensez à quelles communes ?
Chaponost, dans l’ouest lyonnais. Je n’ai pas encore discuté avec son maire. Mais on peut se demander pourquoi cette commune de 8 000 habitants ne fait pas partie de la communauté urbaine et on peut se poser la même question pour certains villages de la côtière des Dombes ou du sud de Lyon.
Il y a des résistances ?
C’est clair. Les maires de ces communes ont peut-être peur de perdre certains de leurs pouvoirs ou de voir leurs impôts augmenter. Mais je pense que rejoindre la communauté urbaine apporte beaucoup plus d’avantages que de problèmes.
Quel est l’intérêt pour une commune de rejoindre la communauté urbaine ?
Ça leur permettrait de profiter de toutes ses infrastructures, notamment en matière de transports en commun. De plus, la communauté urbaine peut apporter son soutien à ces communes pour réaliser certains équipements qui améliorent la qualité de vie.
Votre méthode pour convaincre ces communes ?
Martial Passi, le maire de Givors, qui est aussi vice-président de la communauté urbaine, a montré l’exemple. Car il a pris ses responsabilités en affichant sa volonté de rejoindre la communauté urbaine et il a affronté l’opposition de la droite mais aussi d’une partie de la gauche. Mais il a défendu ses convictions et soumis la question à un référendum où les habitants ont voté en majorité pour rejoindre la communauté urbaine.
Le référendum, c’est une bonne solution ?
Pourquoi pas ? Au sein de la communauté urbaine, Gérard Collomb veut mettre en place une nouvelle gouvernance basée sur la concertation. Alors tout ce qui va dans le sens de la consultation et de l’implication des habitants dans les grandes décisions, est intéressant.
Pourquoi Raymond Barre n’a pas réussi à imposer cet élargissement ?
Parce qu’il ne faut surtout pas l’imposer justement. Il a affiché une volonté très forte  d’élargir la communauté urbaine en reprochant aux habitants de ses communes de profiter des services de la communauté urbaine sans les payer. Ce qui n’est pas entièrement faux. Mais ses déclarations ont aussitôt provoqué une levée de boucliers. Ce qui a tout bloqué. C’est pourquoi Gérard Collomb et moi-même souhaitons adopter une attitude plus pragmatique.
Ça ne risque pas de conduire à l’immobilisme ?
Non. Au contraire. Fédérer de nouvelles communes, ce n’est pas notre priorité car c’est un processus très long. En revanche, on peut rapidement élargir les frontières de la communauté urbaine en mettant en place certains partenariats. Du coup, même si ces communes ne veulent pas nous rejoindre dans l’immédiat, on peut travailler avec elles. Ce qui peut que favoriser un éventuel rapprochement.
Comment dépasser les frontières de la communauté urbaine sans l’élargir ?
En signant des accords thématiques ou en créant des syndicats mixtes. Moi-même, j’ai siégé sept ans comme élu au parc de Miribel-Jonage qui est géré par des communes du Rhône mais aussi de l’Ain. On a travaillé sans problèmes. C’était même plutôt le département du Rhône qui provoquait parfois quelques blocages car il trouvait que ces communes avaient trop de poids.
Justement, vous ne pensez pas que les départements devraient disparaître ?
André Soulier, quand il était adjoint de Barre à la mairie de Lyon, parlait déjà d’un mille-feuille administratif. C’était il y a 10 ans ! Aujourd’hui, Jacques Attali propose qu’en zone urbaine, on puisse faire monter en puissance les agglomérations en supprimant les départements. Et je suis assez d’accord avec eux. Mais si on attend de réussir à détricoter ce maillage administratif avant de travailler ensemble, beaucoup de projets resteront bloqués.
Votre projet ?
Créer une nouvelle frontière métropolitaine. C’est-à-dire travailler avec des pôles urbains comme Saint-Etienne au sud mais aussi Roanne à l’ouest, Mâcon au nord et Bourgoin à l’est. Pour développer des synergies au-delà des départements en profitant chacun de nos atouts tout en assurant un développement urbain cohérent. Car ce sont des bassins de vie interdépendants qui doivent mettre en place une concertation sur les aménagement des espaces, les transports, le développement économique, la culture...
Pourquoi ne pas créer une seule grande agglomération ?
Parce que le gigantisme n’est pas une fin en soi. Notre objectif n’est pas que Lyon ressemble à Francfort. De plus, là encore, si on attend que le débat institutionnel avance pour se mettre au travail, on perdra des années. Voilà pourquoi Gérard Collomb a rencontré Maurice Vincent le maire de Saint-Etienne le jour même de sa réélection à la présidence de la communauté urbaine. C’est un signe fort pour dire qu’on va instaurer des convergences au-delà des rigidités administratives actuelles. Ce qui me semble la démarche la plus efficace.

Propos recueillis par Lionel Favrot

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