Hôpital Jean Mermoz : "Pas le droit à l'erreur"

Hôpital Jean Mermoz : "Pas le droit à l'erreur"

Sept ans après le lancement de ce projet, l’hôpital privé Jean Mermoz va enfin ouvrir cet été. Interview de Bernard Voiseux, le directeur général de cette clinique.

L’origine de ce projet ?
Bernard Voiseux : Tout commence dans les années 1990 quand Générale de santé décide de se développer sur l’axe Paris-Lille, en passant par Lyon. Ce groupe spécialisé dans les cliniques rachète successivement trois établissements dont deux chirurgicaux avec une centaine de lits chacun, Jeanne d’Arc et Sainte-Anne Lumière, et un établissement de 30 lits plutôt spécialisé dans la cancérologie, Saint-Jean. Mais rapidement, au début des années 2000, l’objectif est de rapprocher ces trois établissements. Avec un projet médical axé autour de la cancérologie, de l’orthopédie et des chirurgies de spécialité. En misant sur l’excellence avec un plateau technique de pointe et des professionnels réputés.
Mais pourquoi regrouper ces trois établissements ?
D’abord les bâtiments de ces cliniques étaient très vétustes, le plus ancien datant de 1924. Ce qui exigeait des investissements importants pour les mises aux normes. Ensuite, on voulait rester à la pointe avec une clinique moderne. Enfin, on souhaitait réaliser des économies. Car bien équiper trois établissements coûte évidemment plus cher qu’un seul plus important. On a donc lancé ce projet en 2001.
Sept ans pour construire une clinique, c’est long !
Effectivement, mais nous avons vécu un certain nombre de coups durs. En 2003, l’entreprise chargée de ce projet a déposé le bilan. Du coup, pour terminer la construction du bâtiment, nous avons fait appel à des experts qui ont révélé des malfaçons. A tel point que l’immeuble présentait des risques d’instabilité. Résultat, Générale de santé a décidé de raser ce bâtiment qui était presque fini... Avec à la clef des procédures judiciaires très compliquées qui devraient durer 15 ans. En tout cas, pour nous, cette affaire a été un véritable cataclysme.
Pourquoi un cataclysme ?
Parce que c’est la crédibilité du groupe qui était en jeu. De plus, cet accident de parcours a provoqué des dégâts humains et psychologiques. On craignait que certains médecins ne quittent la clinique. Mais Générale de santé a décidé de ne pas baisser les bras. Et de reconstruire ce bâtiment fin 2005, en vérifiant évidemment la solidité de l’entreprise prestataire. Ce qui a été difficile, mais je pense qu’au final, on a réussi à positiver ce tsunami.
Les points positifs ?
D’abord, on a utilisé ce temps supplémentaire pour impliquer davantage le personnel. Car il faut bien avouer qu’au départ, les équipes de ces trois établissements n’avaient pas envie de travailler ensemble. Car elles avaient des cultures différentes et elles étaient même concurrentes. De plus, certains craignaient que ce regroupement entraîne des licenciements. Ce qui n’a pas été le cas, bien au contraire. Bref, ces années nous ont permis de discuter, de faire de la pédagogie, d’organiser de nombreuses réunions de travail avec les équipes médicales, techniques, soignantes... Mais aussi d’uniformiser les contrats de travail, de remettre à plat l’organisation, de former certains salariés... Et aujourd’hui on pense même que sans ces années de retard, ça aurait été vraiment difficile. D’autant plus qu’on a également amélioré notre projet.
Les améliorations apportées au projet ?
En fait, au lieu d’ajouter simplement les trois structures, comme c’était le cas dans le premier projet, on a décidé d’augmenter les capacités d’hospitalisation. Avec, 5 blocs opératoires supplémentaires, une cinquantaine de lits, des chambres individuelles, un bunker de radiothérapie... Ce qui devrait nous permettre d’augmenter notre activité de 20% dès 2009. On a même essayé d’obtenir l’autorisation d’avoir un petscan, un équipement utilisé dans le diagnostic du cancer. Car notre établissement est le premier établissement privé derrière Léon Bérard pour cette pathologie. Mais on n’a pas obtenu gain de cause. En revanche, on va ouvrir un service d’urgences en janvier 2009... Et on vise 15 000 patients d’ici deux ou trois ans.
Pourquoi créer un service d’urgence ?
Parce qu’on considère que ça fait partie de l’offre de soins d’un établissement de ce type. En 2005, notre demande avait été rejetée. Avec une opposition forte des Hospices civils de Lyon dont l’urgence est la spécialité. Mais en mars 2007, on a enfin obtenu cette autorisation. On pense en effet qu’un service d’urgences permet de recruter des patients. Or un établissement comme celui-là ne peut pas fonctionner uniquement avec de la chirurgie programmée, donc des périodes creuses, notamment l’été. Il faut qu’il soit plein toute l’année. Et ça implique une révolution au sein de nos services car les praticiens devront faire des gardes mais on estime que c’est essentiel. D’autant plus qu’on fera la différence grâce à notre efficacité.
Vous n’avez pas peur de la concurrence ?
C’est vrai que l’hôpital privé Jean Mermoz est implanté près du centre Léon Bérard, des Hospices civils de Lyon, du futur hôpital privé Rockefeller... Mais la concurrence ne nous inquiète pas. On considère que les patients doivent avoir une liberté de choix. Et c’est la compétence qui fera la différence. En fait, je crois plutôt que c’est notre établissement qui risque d’être gênant. Car ce regroupement de trois cliniques réputées offre une vraie force de frappe.
Le timing d’ouverture ?
La première intervention chirurgicale doit avoir lieu le 18 août. Et les trois établissements seront fermés successivement cet été. On a tenu ces délais pour lesquels on s’était engagés il y a 6 mois. Et c’était important car on sait qu’on n’a pas droit à l’erreur. Donc on se met vraiment la pression pour que tout soit parfait dès l’ouverture.

Propos recueillis par Maud Guillot



357 lits sur 32 400 m2
L’hôpital Jean Mermoz s’étend sur 32 400 m2 avec une forme tout en rondeurs et trois bâtiments où la pierre, le bois et le métal ont été privilégiés. Le premier visible de l’avenue Jean Mermoz va accueillir sur 3 200 m2 répartis sur 5 niveaux les consultations des médecins. Le deuxième qui est aussi le principal puisqu’il s’étend sur 25 700 m2 abritera les activités médico-chirurgicales avec la dialyse, le laboratoire d’analyse médicale, l’imagerie, deux services d’ambulatoire, 21 blocs opératoires, les chambres d’hospitalisation... Le troisième bâtiment de 3 500 m2 est consacré à la cancérologie. Avec les consultations, la radiothérapie, la chimiothérapie...
Cet établissement qui compte 357 lits va faire travailler près de 1 000 professionnels : 450 salariés. Mais aussi 150 médecins libéraux qui emploient leur propre personnel (secrétaires, aides opératoires...) en payant une redevance à la clinique pour l’utilisation des plateaux techniques.
Initiative originale, cette clinique a intégré une crèche de 26 places, dont la moitié est réservée au personnel et l’autre aux habitants du quartier.
Coût de ce projet : 62 millions d’euros sans tenir compte du premier projet, c’est-à-dire la construction puis la démolition du bâtiment avec un renchérissement de 25% du coût des matériaux... Soit plus de 50 millions d’euros selon notre évaluation... Mais Générale de santé espère obtenir des dédommagements à l’issue des procédures judiciaires que ce groupe a engagées. Alors que la vente des trois anciens bâtiments est également en cours.

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