Louis-Jacques-Maurice de Bonald nait le 30 octobre 1787, au sein d'une famille de la petite noblesse provinciale. Il est le troisième enfant et le plus jeune fils du vicomte Louis de Bonald et d'Elisabeth de Combescure.
Le jeune garçon passe son enfance dans le château familial de la Monna, près de Millau dans les Causses. Son père est un intellectuel, resté très royaliste, même après la Révolution. Il est d'ailleurs l'auteur d'un livre en 1796, qui sert de bible aux ultraroyalistes pendant la première moitié du XIXe siècle : "La théorie du pouvoir politique et religieux".
Louis-Jacques-Maurice de Bonald reçoit une éducation très stricte où la religion est omniprésente. Il n'a que deux ans lorsque la Révolution éclate, et tous les biens de sa famille sont confisqués. Son père et ses deux frères s'enfuient pour échapper à la persécution, tandis que lui reste caché dans la montagne des Causses avec sa mère et sa soeur.
Son père ne revient en France qu'en 1800, après le coup d'Etat du 18 Brumaire de Napoléon. Il met ensuite Louis-Jacques-Maurice en pension à Lyon, dans un collège de la Croix-Rousse, puis chez les Jésuites à Amiens et enfin au séminaire de Saint-Sulpice à Paris.
Très croyant, Louis de Bonald pousse son fils à entrer dans les ordres. Et à la fin du séminaire en 1811, Louis-Jacques-Maurice de Bonald est ordonné sous-diacre et devient le protégé du cardinal Joseph Fesch, archevêque de Lyon et par ailleurs oncle de Napoléon. Grand aumônier de l'Empire, il est l'homme fort de l'Eglise en France. Et il lance la carrière de Louis-Jacques-Maurice de Bonald en le nommant attaché de la Grande Aumônerie et aumônier de la Salpêtrière à Paris.
Devenu ensuite vicaire général à Chartres puis aumônier du Comte d'Artois, futur Charles X, Louis-Jacques-Maurice de Bonald ne souffre pas de l'exil à Rome du cardinal Fesch après la chute de Napoléon et le retour des Bourbons en 1814.
Avec l'accord de Charles X, il est nommé évêque du Puy en janvier 1823, où il va tout faire pour rechristianiser l'évêché, jusqu'à la révolution de 1830.
S'il refuse dans un premier temps de faire des courbettes au nouveau roi Louis-Philippe, Louis-Jacques-Maurice de Bonald se rend compte que ce comportement intransigeant est stérile. Il adopte alors une attitude qu'il suivra tout au long de sa carrière : ne jamais s'opposer au pouvoir et ne pas se mêler de la politique. Pour lui, un évêque doit être un administrateur avisé plus qu'un théologien inflexible.
Cette souplesse lui permet de devenir en 1839 l'émissaire du pape Grégoire XVI auprès de Louis-Philippe. Et la même année, à 52 ans, il est nommé archevêque de Lyon.
Forte de ses 150 000 habitants, dont 50 000 entassés entre Bellecour et les Terreaux, Lyon est très dynamique. Capitale de la soie, elle attire de nombreux chefs d'entreprise et des activités comme la chimie et la métallurgie. C'est la révolution industrielle.
Comme partout en France, Lyon a été fortement déchristianisée après la Révolution. En comparaison d'autres archevêchés, celui de Lyon, qui regroupe les départements du Rhône, de l'Ain et de la Loire, reste toutefois une place forte du catholicisme.
Louis-Jacques-Maurice de Bonald arrive entre Rhône et Saône dans un contexte pesant. Lyon sort tout juste des deux révoltes des canuts de 1831 et 1834. Et les habitants voient d'un assez mauvais oeil la nomination du cardinal, qu'ils croient proche de Louis-Philippe.
Aimé puis détesté par les canuts
Louis-Jacques-Maurice de Bonald va cependant rapidement les faire changer d'avis. Lors des inondations catastrophiques de 1840, il reste au milieu des Lyonnais pour les aider et les soutenir. Il dénonce également publiquement les conditions misérables dans lesquelles vivent les canuts, ainsi que le capitalisme qui considère l'homme comme "une machine". Le cardinal de Bonald s'affirme comme un précurseur du catholicisme social.
L'une de ses premières décisions spectaculaires est de commander aux canuts 800 bannières en soie bleue pour les processions. Une sacrée bouffée d'oxygène pour les ouvriers qui étaient durement touchés par la crise.
Il crée également des asiles pour l'accueil des enfants et des malades, ainsi que des providences et des refuges, ces ateliers qui permettent de donner du travail aux chômeurs.
Forcément, Louis-Philippe est outré par le comportement de Louis-Jacques-Maurice de Bonald, estimant qu'il sort de son rôle d'archevêque en apportant un soutien moral et matériel aux plus démunis.
En voulant contenter tout le monde, le cardinal lyonnais fait des faux-pas. Ses fameux refuges et providences ulcèrent les canuts, qui dénoncent une concurrence déloyale puisque les patrons s'y fournissent en main d'oeuvre bon marché.
Durant la Révolution de 1848, les canuts saccagent donc les couvents-ateliers de Lyon. Quant au cardinal de Bonald, il se rallie à la deuxième République et demande aux prêtres et aux fidèles de le suivre. Mais le régime ne dure que trois ans, jusqu'au coup d'Etat de Louis Napoléon Bonaparte.
Toujours fidèle à ses principes, Louis-Jacques-Maurice de Bonald ne condamne pas ce coup d'Etat et reste au-dessus de la mêlée. Certains critiquent alors son opportunisme et sa faculté à retourner sa veste.
Très courtois et aimable, il n'est pas un grand orateur. Il a également de grandes difficultés à déléguer et veut absolument tout contrôler dans son archevêché.
Le cardinal de Bonald va ainsi devenir un personnage essentiel de l'expansion de Lyon aux côtés du maréchal Boniface de Castellane, le gouverneur militaire de la ville, et le préfet Claude-Marius Vaïsse, administrateur de Lyon.
Le trio s'entend à merveille, et il y a une vraie complicité dans leurs relations et leur travail au service de l'empereur.
Le préfet Vaïsse lance une grande restructuration administrative de Lyon en annexant les communes de la Croix-Rousse, de Vaise et de la Guillotière. Il crée également le parc de la Tête d'Or et la rue Impériale, aujourd'hui rue de de la République. Et le maréchal de Castellane fait respecter l'ordre dans une ville agitée, tout en faisant très peu intervenir l'armée.
Il est venu le temps des basiliques
Grand bâtisseur, Louis-Jacques-Maurice de Bonald fait construire une dizaine d'églises, notamment sur la rive gauche de Lyon : Saint-André, l'Immaculée Conception, la Rédemption, Saint-Vincent-de-Paul et Sainte-Anne-de-Baraban. Mais aussi Saint-Pierre de Vaise, Saint-Bernard à la Croix-Rousse…
Son objectif est de rechristianiser la ville et surtout les ouvriers qui, avec le développement de l'industrie, sont de plus en plus nombreux. D'où son discours très social, qui vise à les éloigner des tentations extrémistes et notamment des mouvements anarchiste et communiste.
Le cardinal de Bonald crée également le séminaire de Saint-Just, devenu l'actuel lycée éponyme, et plusieurs instituts religieux.
Son plan passe aussi par le développement des missions - la Société des Missions Africaines est créée à Lyon en 1856 et prendra un essor considérable - et le renforcement du cérémonial religieux.
Sur ce dernier point, l'archevêque de Lyon décide d'organiser de grandes manifestations religieuses et des processions avec d'immenses bannières en soie. Remarquant l'attachement fort des Lyonnais à la Vierge, il lance la Fête des Lumières le 8 décembre, avec les lampions en l'honneur de Marie.
Le cardinal de Bonald fait ensuite construire un nouveau clocher à Fourvière où il fait installer une statue dorée de la Vierge. Et c'est au cours de l'inauguration de ce clocher en 1852 qu'il prend une décision importante.
Pour Louis-Jacques-Maurice de Bonald, Lyon et l'Eglise méritent une magistrale basilique sur cette même esplanade surplombant la ville. Ce jour d'inauguration, une grande procession sur la colline avec des feux de Bengale devait avoir lieu. Sauf que la pluie et le vent ont obligé l'archevêché à annuler les illuminations à la dernière minute. Des milliers de Lyonnais sont tout de même venus défiler à Fourvière avec un lampion à la main. C'est devant cette ferveur que le cardinal décide de construire un édifice prestigieux.
La commission de Fourvière, composée de 12 riches Lyonnais, est alors créée afin d'acquérir les terrains destinés à la construction de la future basilique. Le projet est confié à l'architecte lyonnais Pierre Bossan, qui avait à son actif la basilique d'Ars, la trappe des Dombes ou l'église Saint-Georges.
Bossan impose alors un style très particulier pour Fourvière, sorte de mélange d'arts roman et byzantin, donnant au bâtiment des allures de forteresse.
La première pierre est posée le 8 décembre 1872, pour remercier la Vierge Marie d'avoir épargné Lyon durant la guerre de 1870. Mais le cardinal de Bonald ne verra jamais sa plus grande réalisation puisqu'il est mort depuis déjà deux ans, le 25 février 1870. Après des funérailles grandioses, son corps a été inhumé dans la chapelle de la Vierge à la cathédrale Saint-Jean.
Après des années de discrétion voire même de clandestinité, Louis-Jacques-Maurice de Bonald a rendu leur légitimité aux catholiques lyonnais. En bâtissant de nouveaux lieux de culte, en multipliant les manifestations religieuses, en développant les oeuvres caritatives et en tenant un discours très social en direction des plus défavorisés, le cardinal a été l'artisan d'un certain renouveau religieux à Lyon.
Très intéressant, merci beaucoup.
Signaler RépondreVotre historien pourrait-il, à l’occasion, se pencher sur la riche carrière d’Auguste Burdeau ?
Au plaisir de vous lire.
Un fidèle.
Tout ça, c'était il ya longtemps. Les temps ont bien changé. Ne jamais s'opposer au pouvoir n'est pas tenable non plus dans toutes les situations. Il est temps de quitter les portes des cimetières pour aller de l'avant.
Signaler RépondrePetite faute de frappe de ma part dans mon précédent commentaire...l'article sur le cardinal de Bonald est très intéressant ...et non pas inintéressant...
Signaler RépondreExcusez moi...je suis une petite frappe
Il serait bien, enfin, de ne plus confondre Illuminations et Fête des Lumières...
Signaler RépondreMerci pour cet article.
Signaler RépondreArticle très inintéressant mais petite erreur concernent le cardinal de Bonald..
Signaler RépondreSi c'est bien lui qui a fait reconstruire le clocher de la chapelle de la vierge à Fourvière car il s'écroulait et érigé la statue qui sera à l'origine des illuminations lors de son inauguration le 8 décembre 1852,...même s'il n'y est pour rien car ce sont les lyonnais qui ont spontanément mis des bougies à leurs fenêtres...
Par contre il n'a pas fait construire la basilique...
C'est le vœu du 8 octobre 1870, avec les bonnes âmes des pieuses lyonnaises, de Monseigneur Ginouilhac , évêque de Lyon à l'époque qui fait vœu de construire une nouvelle église si la vierge protégeait la ville de l'invasion des prussiens....
Si le projet de construire une nouvelle église était "en germe" depuis longtemps le cardinal de Bonald n'y était pas favorable n'ayant pas l'argent
Et la Commission de Fourvière a été initialement crée en 1853 pour protéger l'environnement du sanctuaire car il y avait des projets de constructions sur la colline...
Cette nouvelle église qui trône sur la colline prendra le titre de basilique mineure en 1897 par Léon XIII
La Fête des Lumières est un évènement organisé à partir de 1999 et dénommé ainsi par la mairie de Lyon. Les Lyonnais, quant à eux, ont allumé spontanément des bougies sur leurs rebords de fenêtres le 8 décembre 1852, jour de l'inauguration de la statue de la Vierge Marie placée sur la chapelle de Fourvière. Le cardinal de Bonald n'est pas à l'initiative des Illuminations du 8 décembre, et encore moins à celle de la Fête des Lumières.
Signaler RépondrePour votre message.
Signaler RépondreQue la paix chrétienne envahisse de nouveau le cœur des hommes
L inventeur de la chaussette LA BONNAL. 😁😁😁😁
Signaler RépondreMerci à ce zélé serviteur de Dieu pour tout ce qu'il a fait à Lyon ! D'autre part, Pierre Bossan, l'architecte de la basilique de Fourvière, s'était convertit au catholicisme à l'âge de 35 ans après sa rencontre avec le curé d'Ars. Il voulait faire de la basilique une forteresse pour foi.
Signaler RépondreEn ce 8 décembre, ayons une pensée particulière pour les chrétiens de Syrie. Que la Sainte Vierge, que nous fêtons aujourd'hui, les protège !